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Ma vie: Couple avec 03 enfants de Kasserine

Ma vie: Couple avec 03 enfants de Kasserine

Tunisie Numérique a mené une série d’interviews auprès des familles tunisiennes pour savoir comment elles gèrent leurs budgets en ces temps de crise que traverse le pays.

Ces tunisiens proviennent de différentes classes sociales, sont d’âges différents et habitent dans des quartiers aussi bien huppés que populaires. Ils ont accepté volontairement de répondre de manière spontanée et anonyme aux questions de Tunisie Numérique. Les récits ont été retranscrits tels quels.

Le mari: Faouzi, 48 ans, enseignant universitaire

La femme: Noura, 48 ans, enseignante du secondaire

Le couple a 03 filles :

  • Mayssa a 16 ans. Elle est en 1 ère année secondaire dans un lycée privé.
  • Maroua a 13 ans. Elle est en 8éme année de l’enseignement de base dans un collège privé.
  • Imen a 09 ans. Elle est en 5éme année primaire dans une école privée.

Pour les 03 filles, le couple dépense 1 000 dinars par mois de frais de scolarité. Les cours privés et autres cours de soutien scolaire coûtent en moyenne 100 dinars par enfant par mois.

Noura est enseignante de secondaire dans un lycée public. Elle touche un salaire mensuel de 1 500 dinars.

Faouzi est enseignant universitaire dans le secteur public. Son salaire mensuel est de 2 500 dinars.

Faouzi nous parle de Noura : « Elle est la colonne vertébrale de la famille. Noura s’occupe de tout. Elle a la responsabilité du foyer, de l’éducation et de l’encadrement des filles ». Il lance avec fierté « Tabarkallah ala marti et bneti تبارك الله على مرتي وبناتي » .

Faouzi rajoute : « Ma femme veille à ce que mes filles réussissent dans leurs études et réalisent de bons résultats avec de bonnes moyennes. Noura se consacre à nos filles et veille tard les soirs durant l’année scolaire pour permettre aux filles de se distinguer et d’être parmi les meilleurs. »

Faouzi regarde l’une de ses filles et dit : « Hamdoullah nos filles nous le rendent bien. Elles ont d’excellentes moyennes même à l’échelle nationale ».

Un budget difficile à gérer

La famille a une voiture qui est souvent dans un garage vu la fin de validité des documents.

En effet, Faouzi nous confie qu’il n’a pas payé ni l’assurance ni la taxe de la circulation (vignette) vu l’augmentation des dépenses quotidiennes.

Faouzi dit à ce sujet : « Il y a une augmentation vertigineuse des prix des produits de grande consommation et des produits essentiels. Les besoins des enfants augmentent également de jour en jour. On n’arrive plus à gérer. On ne s’en sort pas ».

Noura prend la parole : « Dieu nous aide – ربي يعاوننا  pour faire face aux différentes dépenses et surtout les cours particuliers des filles qui dépassent des fois notre capacité à payer. Nous nous sommes entendu Faouzi et moi dés notre mariage à donner une priorité absolue à l’éducation de nos enfants même au détriment de nos propres besoins… »

Soutenant sa femme, Faouzi intervient et précise :« Pour joindre les deux bouts et satisfaire les besoins d’éducation et les autres besoins de la vie, nous essayons d’inculquer certaines valeurs à nos filles et notamment le contentement – القناعة . Nos filles doivent apprendre à se satisfaire de se qu’on peut leur offrir et essayer d’être compréhensives ».

En plaisant Faouzi rajoute : « Notre situation est comme la balance : une fois en haut, une fois en bas et chaque jour apporte son lot de surprises. ».

Le compte bancaire dans le rouge

Faouzi nous confie :« Comme tous les fonctionnaires tunisiens, on a recours à l’endettement en contractant des crédits bancaires. »

Faouzi lance avec ironie : «Nos comptes bancaires sont la plus part du temps dans le ‘‘rouge’’, c’est la seule couleur que mon compte bancaire connait ».

Faouzi rajoute sur le même ton : « Des fois les dépenses sont tellement importantes que même les crédits bancaires ne suffisent plus ou son carrément inaccessibles ما عادش بيها ».

Noura intervient avec le sourire : « L’essentiel est de répondre aux besoins de nos filles et de ne pas les priver d’une vie décente, même si parfois la vie n’est ni généreuse, ni décente ».

Le couple loue une maison dans un quartier huppé de la région pour un loyer mensuel de 500 dinars.

Faouzi nous confie à ce sujet :« Des fois, votre position sociale et votre métier vous contraignent à vivre dans un niveau de vie que tu n’as pas choisi. Et tu dépasses souvent ta capacité financières…Malheureusement c’est une réalité en Tunisie  الله غالب لكن هذا واقعنا في تونس».

Faouzi continue : « En tant que fonctionnaires, nous sommes supposés bien vivre, mais les dépenses dépassent les revenus. »

Le père de famille rajoute avec un sourire taquin :« Ce qui est bizarre, drôle et triste à la fois, c’est que beaucoup de nos proches croient que nous sommes ‘‘la bourgeoisie du pays’’ ».

La couple n’a pas de compte épargne.

Le projet de la maison

Le couple nous raconte qu’il a entamé la construction d’une maison après avoir obtenu un crédit bancaire. Mais le montant emprunté a été vite dépensé et le projet n’a pas été achevé.

Noura nous confie à ce sujet : « Nous avons consommé le montant du crédit. Maintenant nous regardons la structure non finie et nous ne savons pas comment terminer le projet. Le plus dur est de continuer à payer les mensualités de remboursement du crédit qui sont de 600 dinars. C’est difficile et pourtant nous sommes deux et on s’entraide ».

Concernant les dépenses journalières, la famille nous confie avoir recours à l’achat à ‘‘crédit –  الكريدي’’  dans différents points de vente de produits alimentaires, viandes rouges et volailles.

Noura dit à ce sujet : « C’est seulement pour les fruits et légumes que nous payons au comptant. Nous dépensons 800 dinars par mois en moyenne pour la nourriture et les produits d’entretien. Je donne une attention particulière au petit déjeuner et au déjeuner. Le dîner est souvent composé de sandwichs ou de pizzas à la maison. C’est plus économique. Nous commandons une fois par mois un repas chez un restaurant qu’on se fait livrer ».

Tous les membres de la famille bénéficient d’un argent de poche. La cagnotte totalise les 400 dinars par mois pour tous.

Noura nous dit : « les filles ont besoin d’acheter de la fourniture pour leurs études. Faouzi sort de temps en temps au café avec ses amis ».

La famille achète des vêtements de la fripe.

Noura nous en parle : « A la fripe je cherche les vêtements marques connues pour convaincre mes filles de les porter. On va rarement aux magasins de prêt à porter neuf. Même la fripe n’est plus aussi abordable qu’avant ».

La famille alloue 1 000 dinars par an pour s’habiller. Noura nous confie : « Faouzi et moi n’avons pas acheté de nouveaux vêtements depuis au moins 3 ans. On se contente de ce qu’on a tant que ça tient !  ».

Noura rajoute : « J’attends la période des soldes pour acheter du neuf avec des pris plus bas. J’achète en avance d’une année pour l’été ou l’hiver prochain. J’achète également à crédit ou par facilité de paiement ».

La famille n’est pas partie en vacances depuis 2 ans. Faouzi nous dit : « Pour ‘‘calmer’’ les filles nous faisons quelques petites sorties ou profitons des fois de quelques accès à des piscines privées payantes. C’est plus à la portée ».

La rentrée scolaire

Noura Intervient et dit : « Le vrai cauchemar c’est la rentrée scolaire. On évite le plus possible d’aborder ce sujet. A chaque fois, on se dispute et la tension monte entre moi et Faouzi. On est tendus et la pression est énorme. La cocotte fume et la casserole bouille ! ».

Faouzi prend la parole : « On s’endette pour la réussite de nos filles. Nous voulons qu’elles soient brillantes régionalement et nationalement. A chaque rentrée c’est 3 000 dinars au moins qu’il faut débourser. A raison de 1 000 dinars par fille.  On essaie de mettre de côté cette somme depuis des mois. Les prix de la fourniture scolaire n’arrêtent pas d’augmenter. Les prix des cahiers ont dépassé toute logique surtout avec l’inexistence du cahier subventionné. D’habitude nous n’achetons que des produits de qualité auprès de libraire connues. Cette année on a décidé d’acheter chez d’autres points de ventes non conventionnels du marché parallèle qui sont moins chers. Pourvu qu’on y arrive وان شاء الله نخلطوا»

Dépenses familiales :

La facture de la SONEDE est de 60 dinars alors que pour la STEG la facture peut facilement dépasser les 100 dinars par mois. 

La famille consacre 90 dinars par mois pour Internet et les frais de télécommunications (cartes de recharges téléphoniques). Chaque membre de la famille dispose d’un téléphone.

La famille n’a pas de prédispositions particulières pour Ramadhan, le budget est quasiment le même que les autres mois.

Pour l’Aïd Kebir, la famille achète un mouton pour 400 dinars. Faouzi nous déclare à ce sujet : « Le mouton est indiscutable pour les filles. Je dois l’acheter même à crédit ».

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