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Ma vie: Veuf avec 04 filles de Kasserine

Ma vie: Veuf avec 04 filles de Kasserine

Tunisie Numérique a mené une série d’interviews auprès des familles tunisiennes pour savoir comment elles gèrent leurs budgets en ces temps de crise que traverse le pays.

Ces tunisiens proviennent de différentes classes sociales, sont d’âges différents et habitent dans des quartiers aussi bien huppés que populaires. Ils ont accepté volontairement de répondre de manière spontanée et anonyme aux questions de Tunisie Numérique. Les récits ont été retranscrits tels quels.

Ali, 70 ans est fermier. Ali est veuf. Il est père de 05 enfants : 4 filles et 1 garçon.

Ali vit avec ses 04 filles :

  • Asma, 50 ans, célibataire
  • Anissa, 44 ans, célibataire
  • Noura, 39 ans, célibataire
  • Maha, 35 ans, célibataire

Ali se confie à nous : « Je vis avec mes filles. Aucune d’elles ne s’est mariée. Mon fils unique, Haykel, a quitté le foyer familial dès qu’il s’est marié. C’était il y a exactement 2 ans avant le décès de ‘‘El Hajja-الحاجة’’ ».

L’agriculture comme seule source de revenus

Les 4 filles de Ali, travaillent dans le champ familial situé à 5 km de la maison familiale. Il s’agit d’une parcelle de 6 hectares héritée de père en fils.

Ali nous dit à ce sujet : « Mes filles partent travailler tous les jours. Elles sortent de la maison dés l’aube et ne reviennent qu’au coucher du soleil. Elles cultivent des oignions, des fèves, des piments et des pommes de terre. La famille possède également quelques oliviers mais la sécheresse des dernières années a affecté les récoltes ».

Ali continue : « Ma petite fille, Maha, élève quelques moutons, des poules et des lapins. Son élevage aide financièrement la famille surtout avec des récoltes modestes et des prix de ventes dérisoires par rapport à ceux des intermédiaires. ‘‘El gacchara- القشارة’’, ne nous laissent rien. Ils achètent les récoltes à leurs conditions. On est impuissants face à eux. Ils font la loi. C’est soit accepter, soit voire sa récolte pourrir surplace. Sahha Lihoum صحة ليهم».

Diversifier pour survivre

Maha intervient : « Nous avons toujours dépendu de la récolte des olives et de l’huile. Mais ces dernières années, la pluviométrie n’était pas bonne du tout. Il fallait arroser les arbres que nous avions avec l’eau du bassin d’accumulation que nous avions improvisés. Ça n’a servi à rien. Il fallait chercher une source de revenu alternatif et j’ai opté pour l’élevage des animaux de viande ».

Maha souri et nous dit : « J’ai bien fait! J’ai pris la bonne décision, au bon moment. Maintenant mon élevage rapporte plus que l’agriculture classique. Le prix de la viande flambe mais je subi la flambée du prix de l’alimentation animale ».

Des sœurs solidaires

La grande sœur Asma prend la parole : « Nous sommes toutes solidaires e nous nous partageons les tâches entre l’exploitation, la ferme, la maison,…Nous vivons dans des conditions difficiles, dans une maison rudimentaire sans presque aucun confort. Certaines des pièces n’ont toujours pas de fenêtres. On n’a pas pu terminer la maison par manque de moyens.  Nous travaillons 365 jours par an et ça ne suffit pas pour payer les dettes, les frais de médication et les dépenses les plus élémentaires. C’est assez pénible ».

Asma soupire, regarde le ciel et dit :  « Hamdellah lik ya rabbi-    حمد اللاه ليك يا ربي   nous sommes ensembles avec ‘‘El Hajj-الحاج ’’. Tant que nous travaillerons la main dans la main nous ferons face aux problèmes de la vie ».

Des conditions difficiles

La famille habite dans une maison non finie de 3 chambres, sans cuisine équipée ni carrelage.

Asma nous dit à ce sujet : « J’ai développé un asthme à cause des murs en ciment de la maison qui accumulent les moisissures et l’humidité. Ma mère en est morte et mon père, que dieu le garde- أطال الله في عمره, est souffrant lui aussi. »

Asma reprend son souffle et nous déclare : « Nous nous sommes toujours occupées de nos parents malades. C’est d’ailleurs la principale raison que nous avons déclinées les propositions de mariage. Sin on s’étaient mariées, nos parents resteraient seuls sans soutien, ni assistance. La pauvreté dans laquelle on vit est la première responsable ».

Asma continue : « Nous échangeons entre nous des vieux vêtements qui datent de plusieurs années. A 50 ans je mets les vêtements d’il y a 10 ans ! La mode est pour les vivants ! Pour les morts les torchons suffisent ! ».

Asma rajoute avant de s’éclipser : « Je n’ai pas de souvenir que je suis sortie me promener un jour ou que j’ai acheté des vêtements neufs. La priorité est pour les produits alimentaires et les médicaments ».

La sœur cadette, Anissa intervient : « La famille maternelle viennent souvent en soutien.  Mon cousin est poissonnier au marché municipal de Kasserine. Grâce à lui on mange du poisson. Mon cousin a un élevage de vaches laitières et il nous envoi presque quotidiennement du lait et ses invendus en beurre ou fromage artisanal ».

Le rêve de Ali :

Ali, reprend la parole pour dire : « Notre vie est dure. On vit simplement. Je prie dieu pour le bonheur de mes filles. Je rêve de finir la maison et ne plus tomber malade à cause de l’humidité et de la poussière provenant des murs en ciment. Je voudrai finir mes jours en bonne santé. Que dieu nous apporte la pluie tant attendue. Notre agriculture pourra décoller et nous aurons de quoi vivre si les récoltes s’améliorent. On pourra même louer l’exploitation, à un bon prix, si elle devient rentable ».

 Le budget familial :

Les revenus de la famille ne sont pas fixes. Ils dépendent de la pluviométrie et des conditions climatiques. En général les revenus ne dépassent guère les 600 dinars par mois.

La famille maternelle aide avec un peu d’argent ou des produits alimentaires.

  • Produits alimentaires et d’entretien : 350 dinars / mois
  • Médicaments de Ali : 100 dinars / mois
  • Aide au frère Haykel : 50 dinars : mois
  • Facture de STEG : 50 dinars / mois
  • Facture de SONEDE : 30 dinars / mois
  • Budget vestimentaire annuel pour toute la famille de la fripe : 300 dinars

La famille ne prévoit aucun budget spécial pour Ramadhan. Pour l’Aïd Kébir, le mouton est offert par un cousin.

La famille ne bénéficie d’aucune couverture sociale.

 Aucun membre de la famille n’a de compte bancaire, ni postal

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