Economie

Marouane Abassi ne sera pas l’agneau de sacrifice, il déballe tout devant la nation

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Il ne faut pas s’y leurrer : Derrière la conférence de presse de ce mercredi 4 janvier il y a bien plus que l’explicitation des indicateurs macroéconomiques et des projections pour 2023. Certes ces dossiers sont d’importance, avec en toile de fond l’inflation de 11% que nous prédit le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Marouane Abassi, mais ce dernier a surtout voulu remettre les pendules à l’heure, situer toutes les responsabilités. C’est important par les temps qui courent, dans cette conjoncture nationale agitée où les uns veulent faire porter aux autres le chapeau.

Le ministre a jeté la pierre dans le jardin de Abassi

Ce rendez-vous intervient 4 jours après la publication du rapport du Conseil d’administration de la BCT, un document sans fard sur les périls économiques du moment et qui a surtout fait jaser suite au relèvement de 75 points de base du Taux directeur, un tour de vis que nous avions annoncé ici-même. Et qu’est-ce qui s’est passé depuis ? Et bien le ministre de l’Economie, Samir Saïed, a déclaré hier mardi 3 janvier lors de la présentation de son Plan de développement que la BCT aurait pu s’en tenir à une hausse de 25 points de son Taux directeur

C’est une pierre jetée directement dans le jardin de Marouane Abassi. En fait c’est comme si le ministre, dont le Plan de relance de toute évidence n’est pas taillé pour régler les problèmes du pays, anticipait en tentant de se défausser sur les freins que la décision de la BCT aurait posés sur l’économie du pays. Je ne dis pas que Abassi a convoqué la presse pour répliquer à Samir Saïed, ces choses-là ne se préparent pas en 24 heures, je dis juste que le gouverneur de la BCT lui aussi a anticipé le fait que certains tenteraient de lui mettre sur le dos tous les pépins du pays.

À malin, malin et demi

Abassi a pris soin de préciser, en prenant à témoin toute la presse – donc tout le pays -, qu’il n’avait pas d’autre choix que de relever le Taux directeur au regard de la mauvaise conjoncture économique. Or cette dernière est l’affaire du gouvernement, pas la sienne, lui se contente de réagir à un contexte donné pour tenter de corriger, exactement comme le ferait un sapeur pompier. D’ailleurs il invite les autorités à entreprendre au plus vite les réformes pour enrayer les dégâts. C’est aussi une manière de dégager ses responsabilités par rapport à une situation dont il n’est responsable en rien.

Idem quand il revient sur le report de l’examen du dossier de la Tunisie au FMI. Abassi a tenu à souligner que le document a été recalé parce que Tunis n’a pas tenu les délais dans un certain nombre de dossiers, notamment la Loi de finances 2023 et celle sur la fonction publique. Là aussi il est clair que de manière très diplomatique Abassi montre patte blanche. C’est important dans le contexte actuel, c’est l’est aussi pour la postérité, ce que tous les hommes de son rang ne perdent jamais de vue.

Ce n’est pas la première fois que l’exécutif fait une incursion dans le périmètre du patron de la BCT. Le porte-parole du gouvernement s’était enhardi à recadrer publiquement Abassi en précisant que la Tunisie n’avait pas demandé au FMI un montant bien défini, à titre de prêt, mais présenté un ensemble de projets à financer. À l’arrivée c’est le gouverneur de la BCT qui a eu raison, sur toute la ligne. Et c’est tellement vrai que Tunis court toujours derrière ce crédit et courra encore 48 mois, au meilleur des cas, pour toucher la totalité du paquet.

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