Economie

Selon le FMI, l’endettement des états auprès des banques pèse sur la stabilité financière, qu’en est-il de la Tunisie ?

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Les avoirs en dette souveraine détenus par les banques (endettement intérieur matérialisé par les bons du Trésor) atteignent des niveaux sans précédent au moment où les autorités dépensent de l’argent public pour atténuer les effets de la pandémie, indique une note récente du Fonds Monétaire International (FMI).

Ceci accroît la probabilité que les pressions sur les finances publiques mettent en péril la stabilité financière ; Il importe que les pouvoirs publics interviennent rapidement pour limiter ce risque, martèle l’institution financière internationale.

La spirale de l’endettement intérieur auprès des banques

Le FMI souligne que les dirigeants du monde entier ont fortement augmenté les dépenses publiques pour aider les ménages et les employeurs à faire face aux effets économiques de la pandémie. Les États ont émis des obligations pour financer leurs déficits budgétaires, ce qui a entraîné une hausse de l’endettement public. Parmi les pays émergents, le ratio moyen de la dette publique au produit intérieur brut (un indicateur essentiel de la santé budgétaire d’un pays) a atteint l’an passé un niveau de record de 67%, d’après le chapitre 2 de l’édition d’avril 2022 du rapport sur la stabilité financière dans le monde du FMI.

On note aussi que les banques des pays émergents ont fourni l’essentiel de ce crédit, ce qui a fait augmenter leurs avoirs en dette souveraine à un niveau record de 17% de leurs actifs en 2021. Dans certains pays, la dette souveraine représente un quart des actifs bancaires. Il en résulte que les États des pays émergents sont fortement tributaires du crédit que leur accordent leurs banques, et que ces banques sont elles-mêmes fortement tributaires des obligations d’État, qui peuvent leur servir de garanties quand elles cherchent à se financer auprès de la banque centrale.

Cas de la Tunisie

L’encours des bons de Trésor à court terme s’élève à fin mars 2022 à 3873,1 MD tandis que l’encours des bons de Trésor dits assimilables (à long terme) est estimé le jour même à 16871,8 MD. L’encours des dettes, sous forme de bons d’Etat auprès des banques, est au total de 20744,9 MD.

La dette intérieure globale est estimée d’après les dernières données officielles actualisées à 40972,1 MD représentant, à cet effet, 39,9% de l’endettement total du pays.

Particulièrement depuis 2017, les gouvernements successifs ont eu recours à l’emprunt direct de crédits auprès des banques pour mobiliser des ressources financières. L’Etat a emprunté dès lors à neuf reprises des crédits auprès des établissements financiers vu que l’article 25 du règlement intérieur de la Banque centrale de Tunisie interdit d’emprunter des crédits auprès de la BCT.

L’institut d’émission n’a cessé depuis de mettre en garde contre les risques de la politique des gouvernements de recourir sans limites à l’endettement intérieur considérant que ceci n’est pas dans l’intérêt de l’économie nationale surtout que ces financements ne sont pas orientés vers des secteurs économiques.

Le FMI a indiqué dans une note d’analyse qu’il a publiée sous le titre « La restructuration de la dette souveraine intérieure : un outil à manier avec précaution » que face aux vulnérabilités grandissantes en matière d’endettement et au poids croissant de la dette souveraine intérieure dans les pays émergents et les pays en développement, jamais les questions relatives au moment opportun d’une restructuration de cette dette et à ses modalités ne se sont posées avec autant d’acuité.

Rappelons, par ailleurs, que selon une analyse de l’agence de rating, Standard & Poor’s (S&P), le coût du défaut de la dette souveraine tunisienne s’élève à 7,9 milliards de dollars (soit 21,4 milliards de dinars) pour le secteur bancaire (principal préteur intérieur de l’Etat), ce qui représente 102% du total des fonds propres de tout le système bancaire, et 17,3% du PIB pour 2021.

Selon S&P, l’exposition des banques tunisiennes à la dette souveraine a plus que doublé pendant la dernière décennie, couplée à une forte hausse de la dette publique.

L’agence de notation a précisé qu’un défaut souverain en 2022 demeure très improbable, et si c’est le cas, il coûterait aux banques entre 4,3 et 7,9 milliards de dollars ou 55% à 102% de leurs fonds propres.

Pour autant, le FMI appelle les gouvernements de manière générale, à mettre en place certaines mesures pour gérer au mieux leurs dettes auprès des banques dont notamment, l’adoption des cadres de résolution pour la dette souveraine intérieure afin de faciliter une restructuration et un désendettement ordonnés lorsque c’est nécessaire et le renforcement des procédures encadrant la liquidité ordonnée des banques lorsque celle-ci est nécessaire, et apporter des liquidités en temps de crise. 

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Publié par
Mohamed Ben Abderrazek
Tags: FMI