Politique

Kais Saied ne doit pas avoir peur du 14 janvier mais de lui-même

Kais Saied ne doit pas avoir peur du 14 janvier mais de lui-même

La colère, on le sait, est mauvaise conseillère, et il se trouve que le chef de l’Etat, Kais Saied, est très souvent en colère. Très souvent pour de bonnes raisons, on n’en disconvient pas, mais ce sont les actes qu’ils posent en réaction qui sont problématiques. Ceux qui soufflent à son oreille se doivent de lui dire que quand on a tous les leviers du pouvoir entre ses mains on n’a pas le droit de se mettre dans des états pareils parce que ça altère le jugement. La conséquence immédiate des emportements ce sont des dérapages qui entraînent toute la nation vers le précipice. Quand on a dans ses mains toutes les clés de la maison Tunisie, on a une responsabilité historique devant Dieu et devant les hommes.

Ils le mènent à sa perte et la Tunisie avec

Kais Saied n’a pas intérêt à écouter ses soutiens les plus zélés, ceux dont la raison est obstruée par la haine, autant que les islamistes revanchards qui n’ont eu qu’une seule obsession depuis qu’ils ont pris les rênes du pays : Faire payer ceux qui les ont brimés durant le règne de fer de Ben Ali. Pourtant certains d’entre eux, dont leur leader Rached Ghannouchi, sortaient tout droit d’un exil doré que seul le départ précipité du “dictateur” a abrégé. Ils ont grillé un précieux temps dans les règlements de compte, en perdant de vue l’essentiel : le bonheur des électeurs qui ont la faiblesse de les croire. Kais Saied ne doit pas suivre leur sillage…

Le ramdam que fait l’opposition en ce moment au centre ville de la capitale n’avait aucune raison. Ce ne sont pas leurs centaines de partisans qui vont changer quoi que ce soit à la trajectoire prise par le pays le 25 juillet 2021. Leur crédibilité et leur popularité tendent vers zéro, ce qui explique d’ailleurs que l’écrasante majorité des Tunisiens aient chaudement applaudi le président de la République le soir du 25 juillet. Sauf qu’en touchant le symbole national de la fête de la Révolution, unilatéralement, sans même soigner la forme, le chef de l’Etat a chauffé à blanc ses détracteurs, inutilement…

C’est un simple décret qui a effacé le 14 janvier et a mis à la place le 17 décembre, un autre décret du successeur de Kais Saied viendra défaire ce qu’il a fait. Ainsi de suite. Qu’a gagné Kais Saied dans cette affaire ? Qu’est-ce que ça a fait avancer pour la Tunisie ? Rien, à part un tintamarre monstre de la part des opposants et beaucoup de temps perdu pour un pays qui n’en a pas. Le président, au passage, se paye une très mauvaise publicité aux quatre coins du monde, laquelle s’ajoute à son passif déjà très lourd auprès des soutiens de la Tunisie.

La tentation russe, chinoise…

Si les menaces qui pèsent sur la vieille et solide démocratie américaine peuvent provoquer son extinction, que dire de la frêle démocratie tunisienne. De ce point de vue rien n’est gravé sur le marbre ; comme toute oeuvre humaine ça se travaille au quotidien, ça s’entretient. Et la Tunisie n’a pas droit à l’erreur parce qu’elle n’est pas effectivement indépendante économiquement, et manque de chance ses soutiens exigent d’elle des gages démocratiques. C’est important pour eux, ça compte. Celui qui a remplacé Donald Trump à la tête des USA, Joe Biden, s’est juré de pourfendre les autocraties du monde entier. Il ne parviendra peut-être pas à avoir la tête des affreux dictateurs russe et chinois, Vladimir Poutine et Xi Jinping, mais accrocher Kais Saied à son tableau de chasse c’est tout à fait dans ses cordes…

Biden a déjà puni la Tunisie en la snobant pour sa méga rencontre des démocraties du monde, il est tout à fait capable de sabrer l’aide financière destinée au pays du jasmin. Il pourrait tout à fait mettre son véto sur les futurs accords avec le FMI, et ce n’est pas l’Union européenne qui lui barrerait la route. Le président américain a pris la décision d’effacer le Mali, la Guinée et l’Ethiopie des accords commerciaux avec l’Afrique, pour cause d’entorses à la démocratie et moult “violations des droits humains” ; Biden est capable de faire pareil pour la Tunisie après la kyrielle d’avertissements, notamment la dernière salve du Congrès américain. Kais Saied aurait tort de minorer la mise en garde…

N’avoir aucune tête qui dépasse c’est la tentation de tous ceux qui aspirent à présidentialiser à outrance un régime. Poutine et Jinping ont tellement excellé dans cet art qu’il n’y a plus d’opposition en Russie et en Chine. Les médias, qui éveillent les consciences, forme les citoyens et sans lesquels aucune démocratie n’est viable, ont été les premiers à faire les frais des tours de vis chinois et russe. Kais Saied a créé la stupeur avec sa dernière sortie sur la presse. Après le pyromane Saied, la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, a joué à la pompière en courant illico presto pour donner des gages au président du Syndicat des journalistes. Mais nous vu d’ici on demande à voir. Car depuis les engagements de Bouden on n’a rien vu, on n’a pas eu plus de tuyaux qu’avant sur ce que cuisine l’exécutif tunisien…

Le chef de l’Etat passera et les médias resteront, c’est ainsi. C’est à lui de définir le type de rapport qu’il aura avec la presse. Et surtout c’est à lui de décider de ce qu’on dira de lui après qu’il aura tiré sa révérence, c’est à lui de choisir la place qui sera la sienne dans les annales de l’Histoire, aux côtés de Habib Bourguiba, Farhat Hached… Tout se dégoupille ici et maintenant. A vous de jouer Monsieur le président de la République…

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