Depuis la mise en place des mesures du 25 juillet relatives au gel des activités du Parlement et la mise en oeuvre du décret présidentiel n°117 du 22 septembre ayant formalisé les décisions en question, la Tunisie est sous la loupe du monde entier.
Certains partenaires de la Tunisie à l’étranger ont exprimé leur inquiétude face à la concentration des pouvoirs entre les mains d’une seule personne ainsi que l’état des droits et des libertés.
De ce fait, le Président de la République Kais Saied a reçu des coups de fil des présidents et des responsables étrangers pour s’assurer du respect du processus démocratique.
Le président français Emmanuel Macron, la chancelière allemande sortante Angela Merkel et le haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Josep Borell étaient parmi les responsables ayant contacté le Chef d’Etat Kais Saied à ce propos.
Cependant, il y avait une différence remarquable entre les comptes rendus des deux parties sur l’objet des entretiens ainsi que les points qui ont été évoqués.
Un entretien, deux versions et mille et une interprétations
Kais Saied et Emmanuel Macron
D’après le communiqué publié sur la page officielle de la présidence de la République, les deux responsables se sont entretenus le 02 octobre 2021 sur la coopération tuniso-française, l’état d’avancement des préparatifs du Sommet de la Francophonie, la réduction du nombre de visas accordés aux tunisiens ainsi que l’amélioration de la situation sanitaire dans le pays.
Hélas, le communiqué de l’Elysée n’a pas mentionné le sujet du Sommet de la Francophonie. Il a, en contrepartie, fait savoir que Macron a mis l’accent sur un calendrier institutionnel attendu par les tunisiens et la communauté internationale.
L’Elysée a, d’après la même source, exprimé son attachement à un “dialogue inclusif” portant sur les réformes institutionnelles mises en place par Kais Saied.
Kais Saied et Angela Merkel
Concernant l’entretien téléphonique entre Angela Merkel et Kais Saied, de nombreux points de différence ont été relevés.
Selon le communiqué de la présidence de la République, les deux responsables se sont entretenus le 29 septembre 2021 sur les relations bilatérales entre les deux pays ainsi que la nécessité de respecter la suprématie de la loi comme traduction de la volonté du peuple.
En contrepartie d’après le communiqué de l’ambassade allemande, Merkel a appelé Kais Saied à reprendre la démocratie parlementaire et ce, dans le cadre d’un dialogue inclusif impliquant toutes les parties politiques.
Kais Saied et Josep Borell
Le dernier coup de fil marquant la sélectivité faite par la présidence de la République était fait entre Kais Saied et Josep Borell le 16 octobre 2021.
Toujours dans le communiqué de la présidence de la République, aucune information ne figure pour évoquer l’établissement d’un calendrier bien défini pour le retour à un cadre constitutionnel.
Le respect de la séparation des pouvoirs, de l’état de droit et de la démocratie parlementaire ainsi que la sauvegarde des libertés fondamentales et l’organisation d’un dialogue transparent et inclusif… Tous ces points ont été éliminés du communiqué de la présidence.
Une communication sélective
Les exemples mentionnés ci-haut montrent que la présidence a eu recours à une communication sélective dans les comptes rendus des rencontres avec responsables étrangers et ce certainement dans le but de rassurer surtout l’opinion publique nationale.
Il s’agit d’une subjectivation des paroles politiques basée sur un paradigme persuasif ayant pour but de renforcer davantage le soutien du peuple aux décisions présidentielles.
D’une manière générale, les acteurs politiques sont devenus de plus en plus conscients des opportunités offertes par les réseaux sociaux employées pour les avantager et mettre en avant leurs paroles et leurs positions.
Toutefois, cette nouvelle exigence de visibilité médiatique n’exige pas seulement d’être talentueux pour pouvoir atteindre un public large mais aussi d’avoir la capacité d’interpeller les gens ciblés via leurs canaux préférés et en diffusant les informations qui vont plaire à cette catégorie.
La page officielle de la présidence était, dans ce cas, le moyen le plus adéquat pour Kais Saied pour s’adresser à ses sympathisants. Facebook était, de ce fait, l’un des étalons utilisés pour plaire à la catégorie ciblée et montrer que tout allait bien.
Tous ces faits sont justement révélateurs du recours à une communication sélective par la présidence dans diverses occasions.
Il serait cependant utile d’aller voir les comptes rendus des partenaires étrangers, les communiqués des agences de notation et ceux des organisations internationales pour avoir une idée globale, et pas que positive, sur ce qui se dit sur nous.
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