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Le G7, la Chine et le financement d’infrastructures : La misère serait-elle moins pénible au soleil … de la démocratie ?

Le G7, la Chine et le financement d’infrastructures : La misère serait-elle moins pénible au soleil … de la démocratie ?

Les pays en développement, notamment le continent africain, seront-t-ils le nouveau sujet de rivalité entre le G7, les Etats-Unis particulièrement, et la Chine ? Non, ils le sont déjà. Et ce, depuis quelques années. Mais, la dernière décision du G7 lors de sa réunion, fin juin, à Elmau, dans les Alpes bavaroises. L’enjeu ? un programme mondial d’infrastructures.

Du fait des propos du président américain Joe Biden, le G7 compte mobiliser 600 milliards de dollars d’ici 2027. « Ces investissements stratégiques concernent des domaines d’une importance capitale pour le développement durable et notre stabilité mondiale commune, la santé et la sécurité sanitaire, la connectivité numérique, l’égalité et l’équité entre les sexes, le climat et la sécurité énergétique » a-t-il déclaré à l’occasion.

Mais, derrière ces promesses alléchantes se cache un jeu d’influence au relent d’une guerre froide 2.0. Entre soft power et positionnement stratégique, G7 et Chine chacun de son côté avance ses pions sur l’échiquier des pays en en développement. Il faut dire que la demande est grande. Énorme même! Mais, l’offre est-elle à la hauteur des attentes ? il est permis d’en douter. Car, dans toutes déclarations aussi alléchantes, ce qui compte ce sont les détails : ce financement des infrastructures par le G7 est conditionné par « la démocratie ». En face, cela créera « une Chine surdimensionnée » et plus autonome dans le monde en développement. Le « diable » réside inéluctablement dans les détails! Voici, en substance, l’analyse du professeur Shirley Ze Yu, chercheur sénior au Ash Center de la Harvard Kennedy School et directrice de l’Initiative Chine-Afrique de la London School of Economics.

1 000 milliards de dollars Vs 600 milliards de dollars

En effet, cette initiative en matière d’infrastructures, orientée vers les pays à revenu faible ou intermédiaire, vise essentiellement à contrer le projet chinois « Belt and Road » ou « Nouvelle Route de la Soie », dont le budget devrait atteindre 1 000 milliards de dollars. Cela est d’autant plus visible dans le domaine des télécommunications.

Washington ne cache point son soutien à l’entreprise américaine SubCom qui a remporté un contrat de 600 millions de dollars pour la pose d’un réseau mondial de câbles de télécommunications sous-marins. Ce câble s’étendra de l’Asie du Sud-Est à l’Europe en passant par le Moyen-Orient et la Corne de l’Afrique.

De son côté, la Chine n’est pas en reste : Elle a financé la pose du câble « PEACE » finalisé en 2021 et s’étendant le long de la côte est de l’Afrique fournissant ainsi un accès aux données à haut débit et à faible coût de Djibouti à l’Afrique du Sud et à travers la Méditerranée au sud de la France.

Une concurrence par financements interposés. C’est de bonne « guerre »! Mais, quid des relents idéologiques ? Car, fournir une aide, aussi substantielle soit-elle, à des pays « démocratique » demeure un excellent moyen d’appauvrir des sociétés et d’accentuer la dominance des pouvoirs totalitaires ou autoritaires qu’ils soient en place ou en devenir. La montée du populisme en sera bénéficiaire.

La nature a horreur du vide…

Pour l’Afrique, le constat est dur : d’après le classement mondial de la démocratie 2021, publié par «l’Economist Intelligence Unit», sur les cinquante-quatre pays africains classés comme des démocraties à part entière (uniquement Maurice), vingt-trois sont des démocraties imparfaites ou des régimes hybrides. Ainsi, donc si la promesse d’infrastructure du G7 soutient exclusivement les démocraties, pour le cas africain, un seul pays selon la norme la plus stricte – ou vingt-trois pays selon la norme la plus souple – serait même admissible au financement ! comprendre qu’environ 20 % de la population mondiale, vivant dans une démocratie complète et libre, en sera bénéficiaire des financements du G7. Quid des 80% restants ? elle se retournera vers … la Chine.

Cela donne matière à réflexion aux membres du G7 : en raison de leurs fondamentaux politiques, une majeure partie des pays africains et asiatiques ne seraient pas éligible aux investissements du G7 ! Cette situation serait du pain bénit pour la … Chine. L’empire du Milieu représentera probablement et dans un futur proche leur principal ; voire unique ; financier.

Et si l’on analyse les événements de la dernière décennie, « la crise pétrolière mord durement les moyens de subsistance du G7 » et, parallèlement, le vide sécuritaire mondial a accueilli l’incursion de la Chine. Ne dit-on pas que la nature a horreur du vide? idem pour la politique.

La Tunisie bataille depuis presque trois ans pour lever 4 milliards de dollars américains auprès du Fonds Monétaire International (FMI). Même si le pays considéré, et à juste titre, comme le berceau des « printemps arabes se fraie un chemin vers la démocratie ; ces efforts sont restés vains, compte tenu de la crise économique et par ricochet sociale dans laquelle il s’enlise. La démocratie ? Oui, bien évidemment, mais laquelle ? Si l’on procède par cas concret, si la Chine s’était présentée comme bailleur de la Tunisie pour la somme demandée au FMI, le pays aurait accepté tout de go. Même en cas de refus gouvernemental, ce refus ne se serait jamais passé auprès de la population. Une telle décision aurait eu certainement la peau d’un gouvernement et même celle d’un parlement ou d’un président voire même de tout un régime. La démocratie se construit sur les acquis de la liberté politique, économique, ou intellectuelle … mais, jamais sur la misère, la pauvreté et l’angoisse de lendemains désenchantés. A méditer !

   

 

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