Economie

Le gouvernement recourt à l’impôt sur la fortune malgré la difficulté de sa mise en œuvre

Le gouvernement recourt à l’impôt sur la fortune malgré la difficulté de sa mise en œuvre

Le gouvernement compte imposer un impôt sur la fortune pour mobiliser de nouvelles ressources financières supplémentaires pour le Trésor public qui souffre d’un déficit important, alors qu’il est probable que l’imposition de cet impôt rencontrera des difficultés et pourra avoir des résultats contre-productifs, notamment l’exacerbation de l’évasion fiscale et des flux financiers illicites à l’extérieur du pays.

Dans ce contexte, la ministre des Finances, Sihem Namsia, a révélé que les autorités discutaient avec le Conseil supérieur de la Fiscalité de la possibilité d’imposer un impôt sur la fortune dans le cadre de la loi de finances de l’année prochaine, suggérant que l’impôt touchera les biens immobiliers et les actifs dont la valeur dépasse 3 millions de dinars (911,9 mille euros), selon certaines propositions. Les déclarations du ministre ravivent la polémique sur ce nouvel impôt abandonné par les gouvernements précédents.

Effet contre-productif

Cependant, Namsia a confirmé dans une déclaration aux médias, à la fin de la semaine dernière, que l’objectif de la proposition fiscale est d’élargir la base de financement du budget de l’État et d’évoluer progressivement vers la justice fiscale afin de permettre la réduction des charges supportées par la classe moyenne et les salariés.

Toutefois, il aurait été plus approprié de se concentrer sur les mesures de dynamisation du recouvrement des recettes fiscales pour augmenter leur volume tout en luttant contre les évadés fiscaux, d’autant plus que les lois actuelles sont en mesure d’élargir l’assiette fiscale sans recourir à l’imposition de nouvelles taxes, y compris l’impôt sur la fortune.

L’élargissement de l’assiette fiscale nécessite l’appui des instances de contrôle et de recouvrement fiscal et la création d’une base de données permettant de relier les systèmes d’informations exploités par les différents services administratifs, ce qui permet d’identifier les personnes suspectés d’évasion fiscale dans un contexte où la promulgation de l’impôt sur la fortune peut conduire à une augmentation de l’évasion fiscale et la pression fiscale sur les catégories qui payent leurs impôts, d’autant plus que l’expérience française a échoué dans ce domaine.

Un rapport de la Cour des comptes française a confirmé que le coût de recouvrement de l’impôt sur la fortune dépasse les revenus tirés de celui-ci.

Système fiscal fortement dispersé et inefficient

Il est à noter que le volume annuel de l’évasion fiscale en Tunisie est estimé entre 7 et 10 milliards de dinars, compte tenu de la faiblesse du recouvrement des impôts due aux activités non structurées sur le marché parallèle, du régime fiscal forfaitaire qui inclut les professionnels et artisans du secteur privé dont certains payent des impôts ne dépassant pas 0,5% de leurs revenus, outre l’impact de la fausse déclaration d’impôt de nombreuses entreprises qui réduisent délibérément leurs bénéfices afin d’échapper à l’impôt.

L’amélioration de la collecte des recettes fiscales au cours des dernières années indique la possibilité de les améliorer vu leur augmentation de 14% entre 2020 et 2021, sachant qu’elles sont passées de 10 milliards de dinars en 2010 à 34 milliards l’an dernier, soit une hausse de 240%.

Le porte-parole officiel de l’Union générale tunisienne du travail, Sami Tahiri, a expliqué à cet égard : « Tous les gouvernements précédents ont été négligents dans les efforts visant à améliorer le recouvrement des impôts des fraudeurs, alors que les autorités peuvent mobiliser des ressources financières qui la dispensent d’emprunter au Fonds monétaire international » critiquant le recours du gouvernement aux solutions de la mobilisation rapide des ressources malgré son coût social élevé.

Notons que le pays fait face à de grandes difficultés pour collecter des recettes fiscales plus élevées en adoptant la même base de contribuables, selon un document publié par l’Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives (ITCEQ). Le document a montré que le pays exploite pleinement le potentiel fiscal disponible.

Au début de cette année, le gouvernement a annoncé son intention de mobiliser des ressources fiscales d’un montant de 1,8 milliard de dinars par l’augmentation des prix du tabac, ce qui permettrait de fournir 300 millions de dinars supplémentaires au Trésor public, en plus de centaines de millions de dinars sur d’autres postes non déterminés.

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