Economie

Par Amine Ben Gamra- Renflouer le secteur bancaire sous peine de voir le système sanguin de l’économie s’assécher

Par Amine Ben Gamra- Renflouer le secteur bancaire sous peine de voir le système sanguin de l’économie s’assécher

Bien que les impacts économiques soient très difficiles à mesurer à ce stade, les banques seront désormais confrontées à un grand problème, tout aussi dangereux que la baisse du produit net bancaire et des dépôts de la clientèle, le poids important des créances impayées, qui mettent à mal leur trésorerie. En d’autres termes, l’inquiétude réside dans le fait que la crise sanitaire actuelle, dont il est difficile de prévoir la durée, impactera la capacité de remboursement de la clientèle avec pour conséquence, la dégradation de la qualité des portefeuilles de crédits ainsi que celle de la rentabilité des banques.

Déjà, avant la crise du COVID-19, les créances douteuses représentaient 20-24 % du PIB ce qui faisait du système bancaire tunisien l’un des les plus criblés de prêts non-performants au monde. La situation va empirer aujourd’hui.

En effet, l’impact de la crise du COVID-19 n’a pas encore été mentionnée dans les reporting publiés par les banques tunisiennes. Mais l’arrêté semestriel au 30 juin 2020 et surtout annuel au 31 décembre 2020 subiront le double effet de la baisse des produits bancaires (suite principalement à la baisse du taux directeur) et l’impact des provisions à constater afin de refléter les futures dégradations attendues suite à la pandémie COVID-19.

Ainsi, la hausse des niveaux de provision à constater tel que prévu par la circulaire 91-24 et la baisse du produit net bancaire vont engendrer des pertes pour les banques. Ces pertes diminueront leurs fonds propres, donc leur solvabilité, ce qui altère leurs capacités à lever des capitaux.

Si la crise est temporaire, on peut passer à côté de la crise financière.

Si la crise dure, alors leurs fonds propres, sera-t il suffisant pour permettre de continuer à prêter? Si les banques doivent éponger beaucoup de pertes, il leur faudra plus de temps pour se recapitaliser.

Cependant, si les banques ne trouvent pas suffisamment de ressource pour reconstituer leurs fonds propres. Elles s’arrêteront de prêter de l’argent aux entreprises et aux ménages, bloquant ainsi le crédit indispensable à l’économie. Cette crise se propagera à l’ensemble des marchés et entraînera un risque systémique majeur.

Face à cette situation, l’Etat doit  intervenir massivement sur les marchés financiers et doit annoncer d’importants rachats d’actifs toxiques. Dans ce contexte, la mise en place d’une société de gestion des actifs en Tunisie va devenir une urgence et une préoccupation majeure autant pour les pouvoirs publics, que pour les organismes financiers. Une telle structure reprendrait les actifs invendables de tous les établissements de crédit et permettrait de se donner du temps pour céder ses actifs non liquides, avec plus ou moins de casse.

D’autre part, la Banque Centrale doit intervenir sur le marché monétaire pour permettre aux banques de se re-financer immédiatement afin d’éviter une crise des liquidités. De quoi éviter que l’économie se grippe et donne lieu à des faillites en chaîne. Aussi elle doit assouplir les normes prudentielles applicables aux établissements bancaires surtout les exigences en matière de fonds propres et les modalités de classement des actifs et de calcul des provisions pour refléter les futures dégradations attendues suite à la pandémie du COVID-19.

Amine BEN GAMRA. Expert Comptable. Commissaire Aux Comptes. Membre de l’Ordre des Experts Comptable de Tunisie.

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