Société

Tunisie- Pneus de contrebande: le consommateur comme bouc émissaire

Tunisie- Pneus de contrebande: le consommateur comme bouc émissaire

Le ministère du Transport et de la Logistique a lancé depuis quelques semaines une campagne informant les propriétaires de véhicules que désormais, le certificat de visite technique ne sera plus octroyé aux véhicules équipés de pneus provenant de la contrebande.

D’ailleurs, le ministère a appelé ces derniers à justifier l’origine des pneus ainsi que leur conformité aux normes de  sécurité via une facture prouvant que les pneus ont été acheté chez un fournisseur agréé.

Objectif déclaré : Diminuer le Risque D’accidents de la Route

Le ministère a expliqué sa démarche par une volonté de réduire le risque d’accidents de la route, à juste titre.

En effet, déjà en décembre 2020, Afif Frigui, président de l’Association Tunisienne de Prévention contre les Accidents de la Route avait affirmé que les problèmes liés aux pneus étaient à l’origine de 63,9% des accidents de la route recensés en Tunisie du 1er janvier au 2 novembre 2020.

Il est donc légitime que l’Etat, en l’occurrence le ministère du Transport, fasse tout ce qui est en son pouvoir pour remédier au problème, notamment via l’imposition d’un contrôle strict de l’origine des pneus.

Néanmoins, cette nouvelle règle ne semble pas être motivée exclusivement par l’intention de réduire le risque D’accidents.

Monopole et lobbies

Rien qu’aujourd’hui, l’Association Tunisienne pour la sécurité routière a déclaré (d’après un communiqué publié par l’agence TAP) son refus de la démarche du ministère visant, selon elle, à consacrer la domination du marché par une seule entreprise.

En dépit de son soutien à la décision de l’interdiction des pneus non soumis aux contrôles des services compétents, l’association a exprimé son refus de toute atteinte au principe de concurrence loyale, expliquant que cela pourra engendrer une flambée des prix. Une facture de plus à la charge du consommateur .

Un constat qui ne semble pas dépourvu de logique puisqu’il n’y a pas si longtemps, l’Etat aurait interdit à certains fabricants de pneus locaux d’importer les matières premières les obligeant à recourir à la sous-traitance.

Régulation du Marché et pression sur la contrebande / consommateur

Selon certains experts, le marché tunisien serait inondé par pas moins de 800 000 pneus provenant de la contrebande. Des pneus majoritairement non conformes aux normes de qualité et vendus à des prix très attractifs par rapports aux pneus “officiels”.

Ces pneus représentent une alternative non négligeable pour les propriétaires de véhicules désirant s’équiper à petits prix mais à gros risques. Pour certains conducteurs et en temps de crise, l’arbitrage penche souvent vers l’argument économique.

La demande est telle que les revendeurs de pneus de contrebande proposent leurs produits au su et au vu de tous. Il suffit de naviguer sur les pages des revendeurs sur les réseaux sociaux pour se rendre compte de l’ampleur de ce marché parallèle.

Il semblerait donc que la stratégie vise à fermer les vannes du marché en pénalisant la demande.

Dans ce sens, taper sur le maillon faible, ”le consommateur”, permettra d’éviter d’affronter les réseaux et autres barons du trafic.

Ne serait-ce pas un aveu de l’incapacité des autorités à arrêter l’hémorragie de la contrebande. Sinon comment expliquer la facilité avec laquelle ces pneus passent les frontières sans être détectés, de surcroit à coup de centaines de milliers.

Et les compagnies d’assurance ?

Le spot lancé par le ministère du Transport avertit les propriétaires des véhicules que les assurances ne couvriront plus les accidents causés par des pneus non conformes aux normes de la sécurité.

Nous avons déjà expliqué que plus de la moitié des accidents de la route étaient causées par des problèmes liés aux pneus. Il ne serait donc pas faux de dire que les nouvelles dispositions profiteraient incontestablement aux assureurs qui ne paieront plus pour une grande partie des accidents.

Quoi qu’il en soit, il parait peu probable que ces nouvelles mesures soient parfaitement innocentes.

Rappelons-nous lorsque du temps de Riadh Mouakher le ministère de l’environnement avait interdit les sachets en plastique, invoquant la «protection de l’environnement ».

Il s’est avéré par la suite que le principal gagnant de l’adoption de cette mesure étaient les hypermarchés et les supermarchés qui ont profité de cette manne pour  générer des revenus supplémentaires en vendant des sacs à usage unique importés.

Les faits semblent parfaitement transposables…

 

 

 

 

 

 

 

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