Economie

Cadre budgétaire à moyen terme : le ministère des Finances navigue à vue

Cadre budgétaire à moyen terme : le ministère des Finances navigue à vue

En l’absence de méthodologie ou d’hypothèses claires, le ministère des Finances a publié, mercredi 9 février 2022, un rapport intitulé « Le cadre budgétaire à moyen terme » qui a été présenté comme un nouveau plan de développement quinquennal pour la période 2022 – 2024.

Le rapport, qui s’appuyait sur un ensemble de « contradictions » et ne s’appuyait pas sur une approche quantitative et statistique conforme aux normes, indiquait que tous les indicateurs confirment l’existence d’une crise profonde des finances publiques et de la dette publique, qui exige un contrôle urgent des dépenses et un contrôle du déficit budgétaire de l’État, et il a été rapporté que le gouvernement a déjà entrepris l’élaboration d’un programme participatif de réformes nationales fondamentales pour sauver l’économie et redresser la situation des finances publiques. Le début effectif de ces réformes sera l’année en cours.

Sur le terrain, et au vu de l’absence de tout programme officiel de réforme de l’économie hormis quelques fuites de documents à destination du FMI, le rapport ministériel ne contient de facto que quelques mots creux et rien de concret. 

Dans ce contexte, le rapport a évoqué l’évolution des finances publiques pour la période 2022-2024 et présenté ce qu’il a appelé un programme de réformes pour relever les défis, notamment assurer la soutenabilité de la dette publique, soutenir les entreprises, promouvoir l’investissement, mobiliser l’épargne. Poursuivre la réforme fiscale, réprimer l’évasion fiscale, généraliser la numérisation des processus administratifs et encourager les opérations de paiement électronique et la promotion de l’économie verte et du développement durable…

Le ministère a déclaré qu’en l’absence de réformes à moyen terme, la masse salariale continuera sa hausse. Les dépenses salariales en 2021 ont atteint le niveau de 20345 millions de dinars, soit l’équivalent de 59% du budget de l’État. Les ressources budgétaires, contre une moyenne de 53% au cours de la période 2010-2019. L’augmentation de la masse des salaires s’explique principalement par ce qui a été imposé par la phase de transition politique, le renforcement des forces de sécurité et de défense face aux menaces terroristes, les tensions géopolitiques régionales, la montée des revendications sociales et l’intégration des sous-traitants et des fonctionnaires…

Selon le rapport du ministère, le programme de réforme de la fonction publique et la réduction de la masse salariale comprend trois axes. Le premier axe repose sur des mesures urgentes visant la maîtrise de la masse salariale à travers la rationalisation des augmentations salariales, la diminution des recrutements et leur limitation aux secteurs prioritaires, et la révision de la mise en œuvre de l’accord du 6 février 2021 entre le gouvernement et l’UGTT sans effet rétroactif et le report de l’application la loi n°38 de 2020 relative aux dispositions exceptionnelles pour le recrutement dans le secteur public.

Quant au deuxième axe, il repose sur l’adoption de nouveaux programmes de réduction des effectifs dans la fonction publique par l’adoption d’un nouveau programme de renvoi à la retraite anticipée avec indemnité, et la possibilité de mettre en œuvre des programmes de départ volontaire avec indemnité financière.

Le troisième axe repose sur le développement des ressources humaines dans la fonction publique en soutenant le programme de mobilité professionnelle au sein du secteur public et entre le secteur public et le secteur privé, offrant la possibilité de travailler à distance dans la fonction publique, et liant le processus de location au niveau de performance et de productivité, sachant que le gouvernement n’a prévu aucun impact financier de ces mesures sur la masse salariale, et qu’il a évité d’entrer dans les détails de son projet de doubler les salaires des directeurs généraux dans la fonction publique sous prétexte d’attirer les « talents ».

En outre, le gouvernement propose de mettre en œuvre la levée progressive des subventions aux carburants jusqu’à ce que les prix réels soient atteints d’ici 2026, et l’augmentation des redevances pour l’exploitation de l’électricité et du gaz sous le titre « ajustement automatique des prix » et une révision des subventions. Pour les produits de base à partir de l’année 2023 suite à la mise en place d’une plate-forme électronique de versement des compensations financières aux familles concernées. Les “réformes” visent également à adopter une nouvelle politique envers les établissements publics, que ce soit en cédant celles « non stratégiques » ou en « améliorant leur gouvernance ».

Si le programme de réforme proposé pour sortir de la crise n’explique pas les effets potentiels de ces mesures sur la société et l’économie et se contentait de références et d’hypothèses financières générales, il cherche en même temps à se conformer aux recommandations des bailleurs de fonds internationaux, en particulier le Fonds monétaire international.

Le ministère a oublié l’impact les augmentations et les promotions et privilèges accordés à bon nombre de fonctionnaires, puisque le gouvernement actuel comprend à lui seul plus de soixante ministres, conseillers et chefs de cabinet…

Outre l’ampleur des privilèges qui se dépensent aujourd’hui avec une générosité sans pareille, les recrutements et les règlements de statut se poursuivent sans passer par les procédures réglementaires.

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