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Côte d’Ivoire : Ce que l’ancien DG adjoint du FMI a gagné avec la CAN 2024 et gagnera bien après

Côte d’Ivoire : Ce que l’ancien DG adjoint du FMI a gagné avec la CAN 2024 et gagnera bien après

On l’a bien compris depuis longtemps : le sport en général et le football en particulier ont dépassé le cadre des joutes sur le terrain, c’est maintenant une affaire éminemment géopolitique qui draine de puissants symboles associés à la puissance des Etats. Il n’y a qu’à voir la joie débordante ou l’affliction des chefs d’Etat et des décideurs politiques dans les tribunes d’honneur des stades pour s’en convaincre. On est nettement au-delà de la simple victoire ou de la défaite sur le terrain sportif, c’est la victoire ou la défaite des nations dans moult autres domaines qui se joue aussi. Le président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, lui aussi a droit à son heure de gloire et bien plus encore en organisant la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) en 2024…

Le miracle de la CAN qui en annonce d’autres

Le choc a été violent pour tout un pays qui s’est mobilisé et a beaucoup dépensé pour l’organisation de la plus belle fête du football africain, laquelle d’ailleurs a largement dépassé le cadre du continent. Les Eléphants de la Côte d’Ivoire ont failli tomber dès le premier tour, leurs grandes ambitions ayant été brisées net par la «modeste» – il n’y a plus de petite équipe en Afrique – Guinée Equatoriale après le faux pas contre le Nigéria. La CAN était terminée pour les Ivoiriens. Mais un miracle s’est produit pour le pays de Ouattara, d’autres bonnes nouvelles suivront, sur d’autres fronts.

La Côte d’Ivoire est depuis des années parmi les champions d’Afrique de la croissance : Une croissance du PIB réel à 8,2% en moyenne entre 2012-2019 (avant la pandémie du Coronavirus), 7% en 2021 et 6,7% en 2022, sous la houlette du président Ouattara, un économiste de renom qui fut le Directeur général adjoint du FMI (de 1994 à 1999, le premier Africain à occuper cette prestigieuse fonction). C’est donc un pays habitué aux grandes réalisations et cela s’est vu dans la manière dont les infrastructures sont sorties de terre pour que la CAN soit un succès d’organisation.

On le sait depuis la CAN organisée par le Cameroun en 2022, en pleine crise du Coronavirus : il est difficile d’assurer systématiquement un retour sur investissement avec les grandes compétitions sportives et d’en faire un moteur pour l’économie nationale. Pour le Cameroun le frein majeur fut le Covid, pour la Côte d’Ivoire l’état de grâce a toutes les chances de perdurer. Il y a tout ce qui a été fait pour accueillir les supporters africains, tout ce qui a été accompli et continuera de l’être bien après la fête du football pour accompagner la dynamique de ce pays de près de 30 millions d’habitants qui s’est imposé comme un poids lourd de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest)…

En fait l’essentiel est là et pas ailleurs. Il faut penser macro-économie mais aussi micro, avec toutes ces entreprises étrangères et locales mobilisées pour construire les installations sportives, fournir tous les services durant la CAN. Ces équipements resteront et tireront vers le haut tout un pays bien après que les rideaux sont tirés.

Ouattara a eu raison de décaisser 1 milliard d’euros

D’abord il y a les stades. Comme à chaque fois qu’il s’agit d’en bâtir en Afrique la Chine était en pole position et cette fois aussi la diplomatie des stades mise en branle par Pékin a été d’une redoutable efficacité. Les Chinois ont remporté les contrats de 3 des 4 stades construits pour la CAN. Ils ont «offert» (c’est beaucoup plus compliqué que ça, tout se paye dans ce domaine) à la Côte d’Ivoire un stade de haut rang, bâti à Ebimpnsté, au nord de la capitale Abidjan (au sud). D’une capacité de 60 000 spectateurs c’est le plus grand du pays.

Après il y a ceux de San Pedro (sud-ouest du pays), Yamoussoukro (centre) et Korhogo (nord). Deux autres stades ont été réfectionnés à Abidjan et Bouaké (centre) et 24 terrains d’entraînement ont été aménagés. Certes les grands chantiers sont pilotés par les Chinois mais il y a aussi la main des sociétés locales telles que la filiale de Snedai à San Pedro. C’est la filiale du français Vinci qui a gagné le contrat du stade de Yamoussoukro ainsi que des tronçons de routes. L’ivoirien PFO Africa a été choisi pour un gros contrat dans la réhabilitation du réseau routier.

Les sociétés ivoiriennes sont très actives durant la compétition : Pour la communication, la restauration et l’animation des «fan zones», avec parfois des partenariats avec des entreprises étrangères comme la nigériane Insight Redefini et le français Publicis. Si les grandes enseignes internationales ont un gros pour appétit pour la CAN c’est parce qu’elle est devenue un vecteur de communication de premier choix pour taper dans les yeux et les oreilles de l’immense marché africain.

La précédente CAN a capté 500 millions de téléspectateurs originaires de 160 pays et ça les sponsors aiment beaucoup. L’équipementier allemand Puma fournit les ballons à la CAN 2024 et la filiale ivoirienne du groupe bancaire panafricain Ecobank assure les moyens de paiement. Parmi les autres contributeurs dans le sponsoring il y a les chinois Tecno dans les télécoms, Apsonic dans la moto, l’ivoirien Porteo dans le BTP (bâtiments et travaux publics) et le français TotalEnergies, un vieux partenaire du football africain…

Mais le principal parrain de la compétition reste l’État ivoirien, avec un investissement de quelque 1 milliard d’euros dans les infrastructures et dans sa ligne de mire un afflux sans précédent de touristes et d’investisseurs.

La manne du méga projet “Sublime Côte d’Ivoire”

Le secteur touristique sera sans doute le grand gagnant de cette compétition, en attendant les retombées pour l’investissement étranger. Rappelons qu’en 2019 les revenus du tourisme en Egypte ont enregistré une progression de 30% grâce à la CAN. Le président Ouattara veut la même chose que son homologue Abdel Fattah al-Sissi. Air Côte d’Ivoire n’est pas le transporteur officiel de la 34e CAN et l’un de ses sponsors pour rien…

Mais le chef de l’Etat ivoirien n’a pas attendu le rendez-vous sportif pour afficher ses grandes ambitions en matière de tourisme étranger. Déjà en 2019 il a mis sur les rails le méga programme “Sublime Côte d’Ivoire”, doté d’une enveloppe de 200 milliards de francs CFA (4,8 milliards d’euros) pour doper le secteur. Ce plan, cofinancée par l’Etat (1 500 milliards de francs CFA) et le secteur privé (1 700 milliards de francs CFA), veut installer la Côte d’Ivoire dans le Top 5 des destinations africaines et en faire un «leader africain du tourisme d’affaire».

Le pays a mis le cap sur des stations balnéaires de haut standing et des circuits touristiques aménagés, à côté de programmes immobiliers gigantesques tels que le luxueux complexe hôtelier «Serena village» niché à Abidjan ou la tour «Abidjan Business City», qui sera à terme le centre névralgique de l’économie ivoirienne et régionale. Plus que jamais le président Ouattara voit loin et grand.

Article extrait de TN Le Mag – Numéro de Janvier 2024, disponible en libre télèchargement (ICI)

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