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Ma vie: Kenza, mère de famille, ouvrière dans une usine et ingénieure diplômée

Tunisie Numérique a mené une série d’interviews auprès des familles tunisiennes pour savoir comment elles gèrent leurs budgets en ces temps de crise que traverse le pays.

Ces tunisiens proviennent de différentes classes sociales, sont d’âges différents et habitent dans des quartiers aussi bien huppés que populaires. Ils ont accepté volontairement de répondre de manière spontanée et anonyme aux questions de Tunisie Numérique. Les récits ont été retranscrits tels quels.

Ali a 34 ans, il est ouvrier dans une usine de la région de Nabeul.

Ali est marié à Kenza sa cadette de 2 ans.

Kenza est également ouvrière dans une société privée malgré un diplôme d’ingénieure en poche.

Ali et Kenza sont originaires de Nabeul et se sont mariés il y a 5 ans. Le couple a 2 garçons, Jaafar 4 ans et Issa 02 ans.

La famille habite dans une maison louée dans la délégation de Menzel Bouzalfa.

La famille n’a pas de voiture.

Un couple soudé

Ali nous raconte : «Kenza est l’amour de ma vie. C’était un coup de foudre. Dès que l’ai vu je savais qu’elle sera la femme de ma vie. Hamdoullah on s’est marié et on a deux princes qui sont la prunelle de mes yeux ».

Ali nous confie : ‘‘ Je gagne 1 200 dinars par mois. Fort heureusement que Kenza est là pour améliorer la cagnotte budgétaire. Même avec les 800 dinars de son salaire mensuel de Kenza, on arrive à peine à boucler les fins de mois. La rentrée, ramadan, les Aïds, les vacances, sont des périodes cauchemardesques pour nous. On évite souvent les fêtes familiales pour ne pas dépenser !’’.

Ali continue : ‘‘Je veux améliorer ma situation financière et devenir propriétaire. Le loyer augmente chaque année mais nos revenus sont stagnants. Louer c’est comme jeter de l’eau dans la mer ! C’est un gouffre financier sans fin’’.

Le rêve de Kenza 

Kenza prend la parole : ‘‘ Je travaille 40 heures par semaine, voire plus. On ne profite de rien. Ça devient pénible et la vie est dure.’’

Kenza continue : ‘‘Les enfants sont encore jeunes et nous peinons à vivre convenablement. Que dire alors quand ils seront plus âgés et que leurs besoins seront impossibles à combler.’’

Kenza nous confie son rêve : ‘‘Mon rêve est d’émigrer avec ma famille. Imaginez, je suis ingénieure mais je ne trouve pas de travail dans le secteur public ni dans le privé. J’ai tout essayé, c’est une voie sans issue. Je suis contrainte d’accepter un travail sous-payé pour vivre et nourrir mes enfants. C’est frustrant, humiliant et c’est de la pure exploitation. Mais que faire !!!’’.

Visiblement remontée Kenza rajoute : ‘‘Je suis ingénieure mais je ne vaux rien ! Je n’ai pas de pistons pour me trouver un vrai emploi correspondant à mes qualifications. Pire la plupart de mes proches n’ont pas finis leurs études universitaires et gagnent mieux que moi. Je suis une ingénieure en sursis ! je n’ai plus d’ambitions en restant ici !’’.

Une famille unie et un budget divisé

La mère de Ali est veuve. C’est elle qui garde les enfants durant la semaine.

Ali nous dit à ce sujet : ‘‘Dieu merci ma mère, qui vit avec nous, garde les gosses quand on est au travail. Ça nous épargne les frais de garderie. Avec elle, je sais que mes enfants sont entre de bonnes mains. Je ne sais pas ce que nous ferions sans elle. Les enfants l’aiment infiniment.’’

Ali continue : ‘‘Malgré le soutien de ma mère, je passe souvent par des crises financières surtout durant les périodes de fêtes. Ramadan a été particulièrement difficile cette année. Les prix ont flambé. On n’a pas gouté aux viandes rouges durant tout le mois. Déjà le prix de la volaille industrielle a frôlé les 10 dinars le kilogramme. Que dire alors des 50 dinars de la viande de mouton. C’est bon j’ai pris ma résolution de la laisser pour les riches.’’

Ali nous donne plus de détails sur sa gestion budgétaire : ‘‘J’ai ma petite stratégie, pour ne pas tomber « en panne » : Je divise le budget en 03. Le premier tiers est pour les dépenses quotidiennes, les dépenses alimentaires et les produits de nettoyage. Le deuxième tiers pour les factures et les frais des enfants. Le dernier tiers est une épargne forcée pour pouvoir dépenser durant les Aïds et en cas de maladie, que dieu nous protège. ‘’

Le budget familial

Les revenus :

  • Revenu mensuel net de Ali : 1 200 dinars.
  • Revenu mensuel net de Kenza : 800 dinars.

Les dépenses :

  • 350 dinars de loyer mensuel.
  • 40 dinars pour la facture de la SONEDE.
  • 120 dinars pour la facture de la STEG
  • 32 dinars pour l’abonnement Internet.
  • 500 dinars/mois pour les dépenses alimentaires et les produits de nettoyage.
  • 100 dinars d’argent de poche de Ali.
  • 70 dinars d’argent de poche de Kenza.
  • 50 dinars en moyenne par mois pour les médicaments sachant que Ali souffre de tension artérielle.

A l’occasion de l’Aïd, la famille achète des vêtements neufs des magasins de prêt à porter pour un budget de 600 dinars. Le reste de l’année la famille s’habille de la fripe.

Pour l’Aïd Kébir, Ali réserve 800 dinars pour l’achat d’un mouton. La somme est mise de côté et épargnée depuis 4 mois.

La famille profite de 02 jours durant les vacances d’hiver et de printemps. La famille part vers le sud. Le budget total est de 600 dinars par an.

Les parents prennent un congé d’un mois durant l’été. La famille passe les vacances estivales à la capitale où habite la sœur de Ali. Elle a une maison dans la banlieue sud, à Ezzahra précisément.

Ali nous dit en dernier : ‘‘Tout est bien sûr hypothétique. Malgré toutes les précautions et en faisant attention à ne faire aucun dépassement, l’inflation fini par grignoter l’épargne et détruire mes plans. Les prix n’arrêtent pas de grimper et les salaires sont au beau fixe. Epargner devient utopique !’’

La famille bénéficie d’une couverture sociale. Les époux ont chacun un compte bancaire. Ali a également un compte d’épargne.

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