A la une

État d’urgence à Lampedusa : 6000 migrants en moins de 24h, l’Allemagne ferme ses portes, l’accord Tunis-UE mort-né?

État d’urgence à Lampedusa : 6000 migrants en moins de 24h, l’Allemagne ferme ses portes, l’accord Tunis-UE mort-né?

Le maire de la ville italienne de Lampedusa, Filippo Mannino, s’est exprimé en ces termes : «C’est un drame humanitaire». Il parle des 6000 migrants dont «de nombreuses familles avec des mineurs» qui ont débarqué sur l’île en moins de 24 heures, d’après le recensement de la Croix-Rouge italienne effectué hier mercredi 13 septembre. Les autorités locales ont décrété l’état d’urgence dans cette île située entre la Sicile et la Tunisie , rapporte l’agence de presse italienne Ansa.

La Croix-Rouge italienne, qui prend en main les migrants depuis juin dernier, dit qu’elle est débordée par ce flux très dense. La capacité du centre d’accueil est à niveau «critique»,  s’alarme l’association. La structure accueille au maximum 400 personnes, elle en «héberge actuellement plus de 6 000», a confié l’organisation au journal italien Corriere della Sera.

Pourtant pas plus tard que le 7 septembre 2023 le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES) faisait état d’une baisse spectaculaire, -20%, du nombre de migrants irréguliers qui ont débarqué en Italie depuis le début de cette année jusqu’au 31 aout 2023, en comparaison avec la même période de l’an dernier. Manifestement la donne a changé de manière tout aussi spectaculaire…

«Chacun a aidé à sa manière les migrants qui en avaient besoin mais il est désormais temps de trouver une solution structurelle», a confié Filippo Mannino à Ansa. Par ailleurs le maire a signalé, sur Facebook, le décès d’une petite fille – à peine cinq mois – suite à une chute dans la mer. Une journée de deuil a été décrétée ce jeudi dans la ville.

Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, a posté sur Twitter que son gouvernement «fera tout ce qui est nécessaire pour aider les habitants de Lampedusa et les migrants qui continuent d’arriver sur l’île». Dans un entretien avec le journal Corriere della Sera le ministre a averti que la crise des migrants pourrait s’accentuer. Il a ajouté que Rome a besoin du concours des autres pour faire face. Il a insisté sur l’appui des Nations unies et du G20 pour trouver des solutions radicales…

Mais pour l’Allemagne ce sera non. Berlin a annoncé hier mercredi 13 septembre qu’il gèle “jusqu’à nouvel ordre” l’accueil de demandeurs d’asile venant d’Italie, en vertu du “mécanisme volontaire de solidarité européen”. Les autorités allemandes arguent “la forte pression migratoire actuelle vers” leur pays pour justifier leur décision et accusent Rome de ne pas remplir ses obligations au titre du règlement de Dublin, rapporte le Financial Times.

C’est un “coup dur pour l’unité européenne face à la hausse du nombre d’arrivées en Méditerranée”, commente The Telegraph. Rappelons que l’accord de relocalisation dans les Etats de l’Union européenne (UE) est en place depuis juin 2023 ; dans ce cadre l’Allemagne avait pris l’engagement de recevoir 3500 demandeurs d’asile. Elle a dit Stop alors qu’elle en est à un peu plus de la moitié, 1700 exactement. De fait le pacte européen pour “alléger le fardeau” de l’Italie est rompu.

L’afflux des migrants, essentiellement en provenance de la Tunisie, était un des points que devait aborder la délégation de la Commission des Affaires étrangères du Parlement européen, annoncée ce jeudi à Tunis. On a appris que finalement les députés européens ont été interdits de fouler le sol tunisien pour cause de “multiples réserves” sur cette visite, indique une note du ministère tunisien des Affaires étrangères.

Donc clairement le dossier des migrants clandestins attendra. Entre temps le mémorandum d’entente paraphé par la Tunisie et l’UE, suite au lobbying – certains diraient forcing – de la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni, devient de plus en plus impopulaire de l’autre côté de la Méditerranée. Le député italien Benedetto della Vedova n’a pas hésité à parler de fiasco total et l’eurodéputée française Sylvie Guillaume a appelé à suspendre le pacte scellé avec la Tunisie…

Le vice-président de la S&D, Pedro Marques, n’a pas été plus tendre le 12 septembre 2023 : «l’UE ne peut pas financer un régime autoritaire pour externaliser la gestion de la migration simplement pour satisfaire les forces de droite en Europe (…). Nous devrions plutôt soutenir la démocratie et nous engager avec la société civile tunisienne (…) La Commission devrait reconsidérer l’accord UE-Tunisie et le rendre conforme aux traités sur les droits de l’homme et la démocratie»…

Que se passe-t-il en Tunisie?
Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!

Commentaires

Haut