Economie

Par Amine Ben Gamra – Souveraineté alimentaire: agir aujourd’hui pour trouver quoi manger demain

Par Amine Ben Gamra – Souveraineté alimentaire: agir aujourd’hui pour trouver quoi manger demain

À peine une décennie s’est écoulée depuis le printemps arabe, pour lequel la hausse des prix des denrées alimentaires a été l’étincelle qui a allumé la mèche de la révolution.

Aujourd’hui, la situation s’est empiré et notre sécurité alimentaire devient menacée. En effet, à l’heure où l’armée russe se déploie en Ukraine, les perspectives d’une chute de production des céréales font craindre une flambée des prix, alors que notre pays importe l’essentiel de son blé de ces deux pays aujourd’hui en guerre.

En 2021, 97% de nos achats de blé tendre (nécessaire pour faire du pain, notamment) ont été importé, ainsi que 98% de nos achats d’orge. Pour le blé dur (pour faire du semoule et du couscous), les importations représentent 39% de nos achats. Sachant que 47% des importations tunisiennes en blé proviennent d’Ukraine.

On ne joue pas avec la nourriture, ce n’est pas une marchandise mais un besoin vital.

Comment on en est arrivé à cette situation

La Tunisie mène depuis l’indépendance une politique agricole qui sert certains intérêts privés mais pas ceux de la majorité de la population ordinaire. Les entreprises privées de chaque secteur réglementent leurs industries, ce qui leur permet de tenir leurs concurrents à distance. Les producteurs de blé sont contraints de vendre leur production à un monopole public avec un rabais allant jusqu’à 25% par rapport aux prix internationaux, tandis que les minoteries et les producteurs de pâtes sont subventionnés à différentes étapes de la production par l’Etat.

La production locale est soit découragée, soit réglementée au profit de quelques opérateurs. Dans le même temps, le prix de certains aliments de base est subventionné et la plupart des meilleures terres agricoles de Tunisie sont entre les mains de coopératives, autrement dit de l’État. Le résultat est que les revenus des petits exploitants agricoles ont diminué et que la Tunisie n’a pas réussi pour les augmenter.

La confusion entre les régulateurs et les producteurs qui ont investi dans le système de régulation pour leur bénéfice personnel s’est accrue au cours des dernières décennies. Cette situation explique pourquoi la plupart des familles de l’arrière-pays agricole ont vu leurs revenus diminuer et pourquoi la fracture entre une côte plus riche et un ouest et un sud plus pauvres s’est accrue.

Or, sitôt entamé, le conflit russo-ukrainien a provoqué la hausse vertigineuse du prix du blé. Sur Euronext, le prix de la tonne de blé meunier s’est envolé. Les contrats à terme de référence sur le blé tendre rouge d’hiver ont dépassé la limite quotidienne, grimpant de 7.6% à 10,59 dollars le boisseau (environ 27 kg). Le maïs a grimpé de 2.8% pour atteindre son plus haut niveau depuis 2011 avec 5.9 dollars le boisseau.

L’Etat doit céder la place aux jeunes entrepreneurs

L’agriculture peut contribuer à créer des emplois dans le pays et participer significativement à la relance économique mais l’État devrait se désengager et céder la place aux jeunes entrepreneurs surtout au niveau des grandes exploitations pour encourager la production à grande échelle.

Il s’agit de pouvoir se prononcer sur les politiques agricole et alimentaire qui nous concernent. favoriser un système alimentaire local durable et une agriculture digitale.

Aujourd’hui, une grande partie des terres de l’État sont en friche, dans les régions du nord et du centre mais la plupart de ces  terres agricoles sont entre les mains de coopératives.

Parallèlement, l’État devrait se concentrer sur les services publics essentiels et veiller à la regulation du marché (Exemple :amener l’Office des Céréales à assurer un marché concurrentiel, maintenir un stock de sécurité, fournir un appui technique aux acteurs du marché).

Amine BEN GAMRA

Expert Comptable

Commissaire Aux Comptes

Membre de l’Ordre des Experts Comptable de Tunisie

 

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