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Par Jawhar Chatty : Notre crise, une crise de conscience nationale

Par Jawhar Chatty : Notre crise, une crise de conscience nationale

Jean Daniel est journaliste. Jean d’Ormesson est journaliste. L’un de gauche, l’autre de droite. Il leur arrivait très souvent de se chamailler, de croiser les fers par tribunes interposées.  Mais jamais, au grand jamais ni l’un ni l’autre n’ont, aux pires moments du déchirement de la France, trahi leur pays. Même le journal satirique le Canard enchaîné ou encore Charlie Hebdo n’avaient en pareils moments versé dans la division. L’unité de la Nation face à l’adversité est une ligne éditoriale commune à tous. C’est exactement ce qu’on appelle une presse responsable. Quand il y a péril en la demeure, le mot d’ordre est à l’union. Les chamailleries idéologiques deviennent un détail, de l’ordre de l’accessoire, tel un fond de teint.

Que ce soit entendu, il n’y a pas de  presse ou de médias « indépendants ». Il n’existe nulle part une telle presse même pas et peut être surtout pas au sein des grandes démocraties. Les exemples ne manquent pas à cet égard. Il nous suffit de nous souvenir de la couverture qui a été faite par CNN de la guerre du Golfe 1 et 2, des Unes du Times ou du Herald Tribune en ces temps là et, encore récemment, de ces Unes sur fond de guerre entre Trump et Biden.

Une presse ne peut pas être indépendante, du moment qu’elle exprime une opinion. Il serait vain de le lui demander. En revanche, on peut exiger d’elle d’être responsable. Citoyenne et responsable, c’est ainsi et seulement ainsi qu’il nous faudra considérer la liberté d’expression et de la presse.

Nos médias publics et privés confondus sont ils aujourd’hui au niveau de ce SMIC de la responsabilité, de cette dignité qu’attendent d’eux les Tunisiens? Manifestement non, sinon comment expliquer la chute vertigineuse des ventes de la presse papier et de l’audience des différentes chaines radio-tv ? Même la presse électronique n’y échappe pas.

Pourquoi une telle déliquescence ?

Notre pays connaît aujourd’hui la plus grave crise de son histoire. Institutionnelle, politique, économique et financière, sur fond d’une grande frustration  sociale, d’une résilience à la limite de la rupture. Aucun média ne s’est sérieusement soucié d’aborder à ce titre les questions de fond. Des chroniqueurs de la vingt cinquième heure envahissent les colonnes et les plateaux. Ils sont dans la redite et dans la surenchère. Dans la division, la diversion et dans l’abattement du moral de tout un peuple. Des journaleux.

De grands journalistes, le pays n’en manque pourtant pas. Zied Krichen et Sofiane Ben Farhat et d’autres encore sans doute. Des jeunes aussi que je connais et qui se reconnaîtront.

Le journalisme est une vocation. Une souffrance au quotidien. Une éthique et une morale. Cela ne s’enseigne ni à l’IPSI ni ailleurs, cela se forge au contact de la réalité.

Jean d’Ormesson est journaliste et grand écrivain. Jean Daniel aussi. Tous deux connaissent la Tunisie. Tous deux ont su élever l’opinion publique française en éclairant ses choix politiques.

Ici, notre véritable crise n’est pas économique ni financière. Elle est culturelle. Une crise des valeurs au sens propre. Une grande amie, une politique au sens noble du terme, l’a crié l’autre jour à la face de grandes personnes aux sciences infuses…restées terriblement muettes.

Jawhar Chatty

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