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Un désastre devant la presse internationale, alors qu’on pouvait l’éviter

Un désastre devant la presse internationale, alors qu’on pouvait l’éviter

De toute évidence le face-à-face entre la cheffe du gouvernement, Najla Bouden et la presse, dans le cadre du Forum de Davos, a été un ratage total, un désastre communicationnel aussi bien sur la forme que sur le fond. Ses hésitations, son flottement étaient nettement perceptibles, alors que les réponses étaient toutes simples pour peu que Bouden préparât un peu mieux son affaire…

Un piège qu’elle pouvait facilement éviter

Bouden, qui était aux côtés d’un panel de responsables, a été interrogée par un journaliste sur le niveau très faible de l’intégration régionale au Maghreb, à peine 2% d’échanges commerciaux entre les cinq pays nord-africains. Et là elle est partie sur l’accueil des étudiants subsahariens et nord-africains. Ce qui est sans doute vrai et louable pour la Tunisie, avec les dysfonctionnements administratifs chroniques que l’on sait, mais de toute façon ça ne répond pas à la question du journaliste…

Ensuite elle est revenue sur le sujet mais en mettant en cause le chiffre sur l’intégration régionale. “Pourquoi vous dites que avons uniquement une intégration de 2%, sur quoi vous vous basez ?“, a-t-elle rétorqué au journaliste. “Dans les échanges commerciaux“, a précisé ce dernier. Mme Bouden a dit : “Encore une fois, cette intégration commerciale elle se base sur un certain nombre de critères, que sont les critères d’échange, de balance commerciale. Et à ma connaissance nous n’avons pas uniquement ce taux d’intégration à l’échelle du Maghreb…“.

Ce sont des chiffres officiels vous les trouvez un peu partout. C’est une des zones les moins intégrées économiquement et commercialement“, a répliqué le journaliste à Mme Bouden, dont l’inconfort sur ces sujets sautait aux yeux. “C’est peut-être… alors…le… euh… cette… ce chiffre que vous avancez il est peut-être en-deçà de la réalité“, a-t-elle répondu…

Puis elle a ajouté : “En tout cas ce que nous avons fait très récemment c’est de booster cette connexion et les infrastructures que sont les nôtres, notamment avec l’Algérie avec qui il y a la transsaharienne, nous avons le corridor, nous avons un certain nombre d’infrastructures…“. Ensuite elle a évoqué les projets importants en gestation avec l’Algérie, en y greffant des projets tuniso-tunisiens, même si leur impact est régional. Bref, tout cela pour dire que ça ne répond toujours pas à la question du journaliste.

De fait la remarque de ce dernier sur l’intégration au Maghreb est juste et presque tous les rapports internationaux sur la question pointent cette faiblesse, alors que le potentiel économique de cette région est énorme et peut tirer d’affaire tout le monde. D’ailleurs le fait que la cheffe du gouvernement tunisien se soit arrêtée à l’Algérie prouve bien que quelque chose cloche…

En fait le problème majeur ce sont les bisbilles entre le Maroc et l’Algérie, qui durent depuis des décennies, avec une fermeture des frontières entre les deux pays et une rupture totale à tous les niveaux. Comment voulez-vous bâtir quoi que ce soit avec ça ?

Certes le sujet est un peu délicat pour Mme Bouden mais c’est exactement ça qu’il fallait dire, diplomatiquement pour ne froisser personne, et non se lancer dans d’autres directions que manifestement la cheffe du gouvernement ne maitrisait absolument pas.

La faute à Kais Saied

L’inconfort manifeste de Mme Bouden dans la formulation de ses réponses, on le doit aux choix qui ont été faits par le palais de la Kasbah mais surtout par celui de Carthage, par où tout part depuis le 25 juillet 2021. Cette communication hachée à Davos, devant la presse du monde entier, est le résultat du manque d’entrainement de Mme Bouden, lui-même la conséquence d’un black-out médiatique imposé par la présidence de la République…

Le chef de l’Etat et la cheffe du gouvernement fuient la presse comme la peste, ils ne la convoquent que pour faire des discours, des annonces et presque jamais pour des questions-réponses et encore moins pour des débats contradictoires. Même pour l’information les journaux sont obligés d’aller à la pêche, parfois sur des supports étrangers, contrairement aux promesses faites au SNJT. Et quand les journalistes vont chez Mme Bouden, à la Kasbah, elle se débrouille pour esquiver et les laisse avec ses ministres.

C’est tout ça et beaucoup d’autres choses que la cheffe du gouvernement a payés à Davos, devant la presse internationale. Est-ce que cette mésaventure suffira à la convaincre qu’il est urgent d’abord de mieux préparer ses dossiers et ensuite de se frotter plus souvent à la presse locale ? Rien n’est moins certain. Peut-être qu’avec Mme Bouden on prêche une convaincue mais dans cette affaire il y a surtout le chef de l’Etat, et avec lui c’est une toute autre paire de manches.

 

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