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Nadia GAMHA, Vice-Gouverneur de la BCT plaide pour un système financier intégrant les enjeux des changements technologiques, environnementaux et comportementaux

Nadia GAMHA, Vice-Gouverneur de la BCT plaide pour un système financier intégrant les enjeux des changements technologiques, environnementaux et comportementaux

Le tollé suscité par le relèvement par la Banque centrale de Tunisie (BCT) du taux directeur de 75 points de base a été quasi général. Sauf quelques initiés ou connaisseurs des arcanes de la politique monétaire et des techniques de sa conduite, peu sont ceux qui ont essayé d’expliquer les tenants, aboutissants, mais surtout les causes réels et impacts de cette décision, à vrai dire douloureuse. Un « remède de cheval » comme nous l’avons qualifié dans un précèdent article.

Toutefois, si le ressenti amer d’une pareille décision est compréhensible par des opérateurs économiques ou des citoyens qui vivent avec les perfusions que sont les crédits bancaires. Ceux qui ont insinué directement ou indirectement que la BCT joue le jeu des banques commerciales sont allés bien au-delà de ce que l’honnêteté intellectuelle exige.

Après les explications du Gouverneur de la BCT Marouane Abassi, c’est au tour de Mme Nadia Gamha, Vice-Gouverneur, de monter au front. Pour une sortie médiatique, elle n’a pas raté le coche. A la lumière des réactions d’acquiescement de l’assistance, le message est passé. En attendant concrétisation par le système bancaire et financier national.
 
D’abord, le cadre : la clôture, mercredi 25 mai 2022, des travaux du colloque international de l’Institut de Financement du Développement du Maghreb Arabe (IFID). Comprendre un parterre de financiers et économiques tunisiens et algériens diplômés de cette pépinière d’élite.

Ensuite, la thématique de cet événement, à savoir « le financement de l’Économie Post-Covid par les banques et les assurances : une nouvelle problématique ». Un sujet qui tombe à pic !

Tertio ; la contextualisation :  la situation « géopolitique et économique régionale et internationale compliquée exige une remise en cause de plusieurs des certitudes économiques », comme l’a relevé la Vice-Gouverneur. Une succession des chocs économiques qui incite, respectivement, gouvernements, banques centrales et autorités de régulation à repenser les mécanismes de financement de l’économie.

Sans dédouaner la BCT mais surtout en l’impliquant dans une démarche constructive où le leitmotiv est le « Policy mix », Mme Gamha précise que l’objectif de cette approche est de « d’assurer les conditions d’une croissance soutenable et inclusive » car il est « inéluctable de considérer ces chocs comme un catalyseur de changements difficiles mais nécessaires ».

Le clin d’œil est placé. Le cadre pour l’analyse est installé. Pour le sujet du financement, « les solutions ne peuvent être efficaces que si elles sont accompagnées par des réformes profondes de la sphère réelle ». Suivez mon regard !
Pour le diagnostic des répercussions de la pandémie sur le secteur financier et sur ses modes de financement et d’organisation ?

Au lieu d’y voir un obstacle, elle considère la pandémie comme une opportunité : « cela constituerait « un bon point de départ pour engager une réflexion profonde sur les fonctions du système financier qui devrait intégrer les enjeux posés par les changements d’ordres technologiques, environnementaux et comportementaux ainsi que par les impératifs de relance économique. Cette relance économique impose l’adoption de solutions de financement innovantes ».
 
Poussant l’analyse, Mme Gamha a relevé que d’une part, « les schémas classiques de financement axés quasi exclusivement sur l’endettement bancaire ont atteint leurs limites » et que d’autre part les entreprises sont, pour la plupart, des entités familiales sous capitalisées, « souffrant d’un déficit de gouvernance et de transparence entravant leur accès au marché financier ».

Par ailleurs et en dépit des progrès réalisés, le développement de la finance directe via le marché financier n’a pas encore atteint le niveau escompté. D’où la nécessité de poursuivre les réformes entreprises. L’objectif étant « de mettre en place de nouvelles incitations et de créer de nouveaux produits permettant de capter l’épargne longue, notamment institutionnelle, afin de conférer plus de profondeur et de liquidité au marché ». 

D’autre part, le développement d’instruments de financement adaptés aux startups et aux projets innovants et de promotion des nouvelles technologies via le capital- risque et le Crowdfunding « constituent des sources alternatives au financement bancaire de nature à développer la finance directe ».
 
Ainsi, tous les efforts doivent être orientés « réformes ». Mais, comment ? Cela peut se faire, propose-t-elle, en repensant « l’actuel modèle économique tout en tenant compte des priorités de stabiliser les grands équilibres macroéconomiques, de maîtriser l’inflation et de créer un climat des affaires propice pour le développement de l’investissement et la création d’emplois ». Par une aggradation, elle résume les différents défis que la Tunisie se doit de relever. Elle rejoint à ce titre les avis des centrales syndicales et patronales mais aussi le gouvernement et les bailleurs de fonds.

Quant à l’exacerbation des risques, cette situation requiert d’accorder la priorité absolue à la préservation et la structuration du tissu économique existant et ce, « à travers une vision économique et financière fondée sur le renforcement du haut du bilan ». À ce titre, « la BCT considère que les entreprises tunisiennes ont besoin d’un mécanisme de sauvetage de taille conséquente opérant dans le cadre d’un partenariat public-privé et adossé à un programme économique de relance d’envergure ».

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