Société

Par Henda Haouala – Harka de Lotfy Nathan : Un film dur et un jeu d’acteur majestueux

Par Henda Haouala – Harka de Lotfy Nathan : Un film dur et un jeu d’acteur majestueux

J’ai regardé Harka de Lotfy Nathan.  Il est époustouflant. Harka, un titre proprement tunisien qui évoque plusieurs sens de la tragédie sociale que connait le pays depuis plus d’une décennie. Le film tresse le récit de Ali joué par Adam Bessa, un jeune tunisien qui demande à vivre une vie digne, voulant tout simplement travailler.  Comment y parvenir dans un pays corrompu jusqu’à la moelle ? On est assurément dans le sud tunisien, le fief de l’économie parallèle, l’histoire du film se déroule là bas. Mais que fait Ali ? Ali tente tant bien que mal de s’en sortir et de subvenir aux besoins de ses deux sœurs dans ce microcosme d’escroquerie. 

Lotfy Nathan choisit la sobriété du ton et y parvient, la finesse du traitement et y arrive. Dès les premières minutes du film, le cinéaste bâtit la surface du film, elle est douloureuse bien que poétique.   Il choisit  de  construire chaque plan de manière à ce qu’il soit un pur instant dramatique avec une dureté presque hiératique. Ses cadres très composés  dessinent la fragilité des trois personnages du film : Ali et ses deux sœurs. Le cinéaste n’a pas cherché à se connecter à un récit commun, pourtant réel, mais bien à nous poignarder, nous spectateurs,  avec le comble de l’indifférence que nous pouvons exprimer et la solitude de nos âmes. Harka, un  film dur, très dur sans aucune concession sur le ton donné au récit. Une tragédie tunisienne qui fait mal et qui ôte toute notre hypocrisie. 

Néanmoins,  le coup de maître de ce film est l’excellentissime Adam Bessa, un acteur hors pair. Yeux en agate,  son regard à lui seul  est une multitude de rôles. Adam Bessa nous livre un jeu d’acteur rare et majestueux qui oscille entre une interminable attente, une détermination avortée et  un espoir morbide.  La laideur de tout ce qui lui entoure ne fait que renforcer sa présence magistrale  dans le cadre. Ali, tantôt hagard, tantôt rassurant,  séduit du début jusqu’à la fin et arrive même à donner de l’épaisseur à l’injustice et à la corruption avec une grâce déstabilisante. Adam Bessa,  quel atout souligné par une histoire douloureuse ! 

Henda Haouala

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