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Point Afrique: Kenya : le chef d’Etat businessman a montré que tout est possible, en seulement 14 mois

Point Afrique: Kenya : le chef d’Etat businessman a montré que tout est possible, en seulement 14 mois

Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin ne s’y est pas trompé en mettant le Kenya dans son agenda pour sa toute première tournée africaine. Il se passe des choses, beaucoup de choses, au pays de William Ruto, niché dans l’Est du continent (la Corne de l’Afrique). Le virevoltant et brillant homme d’affaires – il a fait fortune dans l’élevage et l’industrie hôtelière – est en train de transformer en profondeur son pays dont il a pris les rênes il y a à peine 14 mois, après avoir occupé la vice-présidence de 2013 à 2022…

Le premier Sommet africain sur le climat, qui a drainé beaucoup de monde et permis de collecter des milliards de dollars, c’est Ruto. C’est encore cet écologiste dans l’âme qui a réuni le 13 novembre, dans la capitale kényane, Nairobi, quelque 175 pays pour un méga Sommet sur les plastiques. Le but de la manoeuvre est de parapher un traité contre la pollution liée aux plastiques. La même journée du 13 novembre a été décrétée jour férié pour permettre aux citoyens de planter 100 millions d’arbres, le même jour.

Le plan gouvernemental planche sur 15 milliards d’arbres à l’horizon 2030. Il le faudra pour conjurer la sécheresse, la pire depuis 40 ans. Il le faudra aussi pour doper une industrie forestière qui pesait l’an dernier 1,6% dans le PIB kényan, d’après les statistiques officielles, lesquelles précisent que les forêts occupaient 8,8% du territoire en 2022.

Le président-businessman, âgé de 57 ans, un «As de la débrouille» qui s’est fait tout seul, a enterré les clivages ethniques, les logiques classiques d’appareil politique et de clientélisme pour s’afficher comme le candidat du peuple, des plus modestes et ça fonctionne très bien jusqu’ici, au Kenya comme en Afrique. C’est en grande partie grâce à l’activisme de Ruto que le continent ira aux prochaines négociations climatiques internationales avec une position commune, dans la perspective de la COP28 programmée en décembre 2023 à Dubaï…

Et peut-être que grâce à ça l’Afrique convaincra enfin les participants de décaisser les 100 milliards de dollars promis pour réparer les dégâts causés par la pollution industrielle occidentale et chinoise. C’est ce même esprit fédérateur au nom de l’efficacité qui a animé le président kényan quand il a annoncé la suppression, d’ici le 31 décembre 2023, des visas pour tous les habitants du continent, sans exclusive, rejoignant ainsi les Seychelles, la Gambie et le Bénin.

«La science nous renseigne que les premiers vestiges humains sur terre ont été découverts au Kenya. Cela signifie que l’humanité a commencé ici. À partir de ce moment, les ressortissants d’Amérique, d’Europe (…) et de partout dans le monde viennent d’ici. Et il n’est pas juste d’exiger à quiconque un visa quand ils retournent à la maison» avait déclaré Ruto en septembre dernier lors du Sommet sur le climat. Charité bien ordonnée commencera par son continent, l’Afrique.

«D’ici la fin de l’année, aucun africain n’aura besoin d’un visa pour entrer au Kenya. Il est temps que nous réalisions l’importance de commercer entre nous et de permettre aux biens, aux services, aux personnes et aux idées de circuler librement à travers le continent. Pour le moment, le commerce entre les pays africains ne représente que 15% contre 70% pour les pays de l’Europe», a dit le président kényan à l’occasion du Sommet des trois bassins forestiers tropicaux, organisé à Brazzaville du 26 au 28 octobre dernier.

De toute évidence le pays de Ruto a fait sa part et s’est mis en ordre de marche vers la Zone de libre-échange africaine (Zlecaf), le seul rendez-vous qui permettra au continent d’exploiter de manière optimale ses immenses ressources naturelles et de sortir enfin des affres du sous-développement pour enfin faire le bonheur de ses enfants. Le message de Nairobi est très clair, aucun pays africain n’en a loupé une miette. Place aux actes. A qui le tour ?

Le 16 novembre le FMI a fait savoir qu’il a scellé avec Nairobi un accord pour un crédit de 938 millions de dollars (864 millions d’euros). Le moteur de l’économie ouest-africaine fait face à une tension sur les liquidités et à des problèmes économiques, donc lui donner un coup de main revient à doper toute la région…

Le Kenya, comme la plupart des pays dans le monde, a payé un lourd tribut à la crise du Coronavirus ; puis il a enchaîné avec les contrecoups de la guerre en Ukraine et la sécheresse historique qui a sévi dans la Corne de l’Afrique. La dette publique de ce pays d’environ 53 millions d’habitants est montée à plus de 10 100 milliards de shillings (64,4 milliards d’euros) fin juin dernier, d’après les données du Trésor, ce qui fait près de deux tiers du PIB.

Le Kenya est bousculé “sur ses liquidés, principalement en raison de l’importante euro-obligation arrivant à échéance” en juin 2024, d’un montant de 2 milliards de dollars, précise le FMI tout en saluant un rebond dans les domaines de l’agriculture et du tourisme. Ce qui explique que le président Ruto s’engage à rembourser dès décembre prochain une première tranche d’une valeur de 300 millions de dollars.

L’économie a fait preuve de résilience, avec une croissance du PIB réel de 5,4% au premier semestre 2023, principalement grâce à une solide reprise du secteur agricole suite au retour des pluies“, dit par ailleurs le FMI dans un communiqué. L’accord sera validé par le Conseil administration du FMI en janvier 2024. Si ça passe le Kenya encaissera immédiatement 682 millions de dollars, indique l’institution financière.

La loi ouvrant la voie au désengagement de l’Etat du secteur productif a été paraphée le mois dernier. «Nous avons identifié les 35 premières sociétés d’Etat qui seront cédées au secteur privé. Nous en avons près d’une centaine d’autres dont la privatisation est en cours d’examen par le gouvernement en collaboration avec des conseillers financiers», a indiqué le président Ruto lors de la cérémonie d’ouverture de l’Assemblée annuelle de l’Association des bourses africaines, organisée à Nairobi.  

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