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Argentine : Le populisme s’arrête là où commence le difficile exercice du pouvoir, la Justice bloque Milei

Argentine : Le populisme s’arrête là où commence le difficile exercice du pouvoir, la Justice bloque Milei

C’est une déroute qui instille le doute, de toute évidence. Le “miracle” Javier Milei n’aura pas lieu… En tout cas pas maintenant. L’ultralibéral président argentin entendait fracasser tout le système, d’une seule traite, il entendait déréguler à tout-va pour libérer les énergies et l’économie avec. Et bien il devra temporiser, contraint et forcé par la Chambre nationale du travail, qui dit le droit dans ce domaine. Les ambitions démesurées du président ont été stoppées net par une décision de justice, provisoirement précise-t-on, après que la plus grande centrale syndicale du pays s’est cabrée et a déposé un recours contre la tabula rasa imposée par le chef de l’Etat.

Libéraliser les prix, les loyers… : Milei est terrifiant, même pour ses électeurs

Pour être tout à fait objectif il y a du bon et même du très bon dans ce que propose le nouvel homme fort du pays. Qui peut raisonnablement – à part les caciques de l’ancien régime qui ont profité des carences du système – s’opposer à des réformes structurelles qui mettent fin aux lourdeurs administratives mortifères, à la corruption, à la dilapidation de l’argent public, à la mauvaise gestion, etc. ? Mais le fait est que Milei terrifie aussi ceux qui l’adulent…

Abattre 300 normes et règlements, d’un coup, c’est certes salvateur pour le pays mais dans le lot il y a aussi la libéralisation des prix, des loyers, etc. C’est la voie royale pour précipiter encore plus d’Argentins dans les bras des spéculateurs, des affairistes. La pauvreté comme unique horizon, même si c’est pour une période limitée – et encore il faut voir… -, même si c’est pour mieux rebondir, “Non merci!” crient les travailleurs. Donc ce sera «une mesure conservatoire suspendant l’applicabilité» des axes du chapitre «travail» du décret présidentiel du 20 décembre dernier.

Après ça les législateurs vont examiner en profondeur la trajectoire que veut prendre le chef de l’Etat. Le 11 décembre dernier on vous parlait des reculades de Milei, du fossé entre les vues de l’esprit – la campagne électorale – et l’exercice effectif du pouvoir dans une réalité âpre. La Chambre nationale du travail sera le deuxième revers de l’homme à la tronçonneuse qui jurait de tout nettoyer au karcher.

Il pourrait être achevé par le Parlement, où il est minoritaire

Ce coup d’arrêt aura force de loi «jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue sur la question de fond soulevée dans la présente procédure», précisent les juges dans leur verdict, repris par plusieurs médias, dont l’agence officielle “Telam”. Le pouvoir en place fera immédiatement appel pour casser la décision, mais en l’état le coup est suffisamment rude pour que Milei soit sonné.

Installé officiellement le 10 décembre dernier il avait  signé 10 jours après un «Décret de nécessité et d’urgence» (DNU) pour faire sauter tous les verrous posés dans les segments de l’économie : Des normes du travail aux réglementations sur les exportations et les importations, en passant par la privatisation des entreprises publiques, les prix, les loyers…

Le président disait qu’il voulait «entamer le chemin vers la reconstruction du pays, rendre la liberté et l’autonomie aux individus et commencer à désarmer l’énorme quantité de régulations qui ont retenu, entravé et empêché la croissance économique». Le hic c’est que le socle de son programme, ce DNU, a été retoqué ; après ça il atterrira au Parlement où la formation de Milei n’est que la troisième force politique.

Le président demandait aux syndicats de s’auto-immoler…

Il fallait s’attendre à cette puissante fronde sociale. Dans la dizaine de recours en justice déposés par les syndicats il y a surtout la levée de boucliers contre l’extension de la période d’essai de trois à huit mois, la réduction des indemnisations en cas de licenciement, un droit de grève sévèrement encadré, la possibilité de virer des employés s’ils bloquent ou occupent le lieu de travail. Comment des salariés peuvent accepter sans broncher qu’on scie la branche sur laquelle ils sont assis?

Les juges ont fait au gouvernement les reproches qui suivent : il «n’apparaît pas ce qui constitue de prétendues raisons d'”urgence” pour éviter la due intervention du pouvoir législatif sur le fond de la législation», certaines normes «ont une nature répressive ou de sanction» ou encore «il n’est pas expliqué comment les réformes proposées, si elles étaient appliquées immédiatement, hors du processus législatif normal, pourraient remédier à la situation» et améliorer rapidement l’emploi formel, «a fortiori vu que le décret lui-même souligne que cet emploi stagne depuis douze ans».

Bienvenue dans les arcanes de la réalité du pouvoir Monsieur le Président de la République…

 

 

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