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La Turquie dans l’UE : Sarkozy et Merkel n’en voulaient pas, Erdogan signe un deuxième “miracle”

La Turquie dans l’UE : Sarkozy et Merkel n’en voulaient pas, Erdogan signe un deuxième “miracle”

En août 2022 on vous disait que le véritable maître du monde – on a à peine exagéré – c’est bien le président turc, Recep Tayyip Erdogan, en vertu de sa capacité à pactiser en même temps avec l’Occident et ses rivaux (la Chine, la Russie, etc.). Rares sont les dirigeants qui peuvent se l’autoriser – on peut citer le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane. Après sa tournée triomphale dans les pays du Golfe, où il a pris ce qu’il a pu – et pas peu – à ses ennemis d’hier, les Wahhabites, Erdogan va enchaîner avec un autre gros dossier, qui traîne depuis des décennies : Son adhésion à l’Union européenne (UE)…

Le ticket de la Suède pour l’OTAN au prix fort

Les 27 ministres européens des Affaires étrangères se rencontrent ce vendredi 21 juillet à Bruxelles pour donner le top départ de l’examen du rapprochement avec la Turquie. Bon, pour le moment on ne parle pas d’adhésion formelle à l’UE mais on y viendra très vite, Ankara y veillera.

Le président turc a eu les Européens à l’usure, en profitant d’un concours de circonstances que les Ukrainiens payent cher : la guerre. Terrorisées par l’ogre russe, la Finlande et la Suède avaient enterré des décennies de neutralité pour filer vers l’OTAN. Et comme on le sait la signature de tous les membres de l’Alliance est indispensable pour toute nouvelle adhésion. C’est là où L’homme fort de la Turquie a eu l’idée de lier le sort de la Suède à la réactivation de son dossier à l’UE.

Ankara a un peu lambiné pour l’adhésion de la Finlande mais a vite cédé. Mais pour la Suède il a pris son temps. Il a saisi la balle au bond pour exiger des concessions majeures telles que des avions de combat américains, la tête de ses ennemis jurés planqués en Suède – les rebelles kurdes – et un tas d’autres choses. Et comme l’OTAN le pressait de laisser passer la Suède il s’est dit que finalement ses demandes sur la table des Européens n’étaient pas un prix trop élevé…

Beaucoup vont encore crier au chantage, comme dans le dossier des réfugiés syriens et irakiens qu’Ankara a monnayé à coups de milliards d’euros. Mais il y a longtemps qu’Erdogan ne se soucie plus des quolibets, d’où qu’ils viennent.

Un joli pied de nez à Nicolas Sarkozy et Angela Merkel

Le dossier turc a traîné parce que les Européens, il faut le dire, voyaient d’un très mauvais oeil l’absorption de ce grand pays musulman – près de 85 millions d’habitants – qui les terrifiait à bien des égards. Et les deux poids lourds européens de l’époque, le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel, ont tout fait pour plomber le dossier turc. Par la suite Erdogan s’est fermé la porte avec ses nombreuses dérives sur les droits humains et les violations des usages démocratiques.

Mais de l’eau a coulé sous les ponts depuis. Quand Erdogan a exigé que son dossier à l’UE soit exhumé pour qu’il appose sa signature sur l’adhésion de la Suède à l’OTAN l’Allemagne lui a clairement dit qu’il était hors de question de lier les deux affaires. Pourtant c’est bien ce que les Européens font ce vendredi à Bruxelles. La ministre allemande des Affaires étrangères défend même l’idée d’une réflexion stratégique sur les liens avec un partenaire «difficile, mais important»…

Une sortie qui fait écho aux propos du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, quand il avait soutenu il y a deux mois l’urgence géopolitique de faire front avec la Turquie après la réélection de Recep Tayyip Erdogan. Ce dernier a remporté haut la main la présidentielle en dépit d’un bilan économique catastrophique. Un véritable miracle. Le second se joue en ce moment même à Bruxelles…

Les ministres européens des Affaires étrangères vont plancher ce 21 juillet sur une aide militaire quadri-annuelle de 20 milliards d’euros à l’Ukraine. Mais c’est assurément le dossier turc qui animera les débats. Pour le moment on s’en tient à la relance de l’Union douanière et la libéralisation des visas. Mais les Européens ne pourront pas louvoyer longtemps, ils devront donner du solide à Erdogan d’ici octobre prochain, date à laquelle le Parlement turc entame le processus de ratification de l’entrée de la Suède dans l’OTAN.

 

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