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Première grande reculade de Saied, à cause de la main étrangère

Première grande reculade de Saied, à cause de la main étrangère

Il n’y a pas que les conditions pour candidater aux législatives qui soient surréalistes, kafkaïennes, il y a le reste, tout le reste. Le chef de l’Etat, Kais Saied, avait mis un point d’honneur à tester une toute nouvelle potion démocratique en écartant les partis politiques – tous les partis, même ceux qui le soutiennent publiquement ; patatras : La donne vient de changer, à la surprise générale…

Le porte-parole de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), Mohamed Tlili Mansri, vient d’indiquer sur une radio privée que les candidats aux législatives de décembre 2022 peuvent utiliser les slogans et programmes des partis politiques, mais en tant qu’individus…

Dans le nouveau scrutin uninominal à deux tours, les formations politiques ne peuvent plus se présenter, mais elles peuvent soutenir et présenter des candidats, sans pour autant prendre part à la campagne électorale“, a ajouté Mansri…

Voilà, c’est à ne rien y comprendre. Bon, on a senti la musique monter à travers ce qu’on a qualifié de contradiction entre les membres de l’ISIE, entre l’interdiction formelle faite aux partis politiques de faire campagne et la possibilité qu’ils le fassent, même par des moyens détournés selon le vice-président de l’ISIE. Cette formule alambiquée, qui n’est pas claire même pour ceux qui l’expliquent, a été confirmée par le chef de l’Etat, Kais Saied, dans sa dernière sortie télévisée. Mais jusqu’ici officiellement la porte restait fermée pour les partis politiques. A en croire Mansri le verrou a sauté… enfin en partie.

Je disais “la donne vient de changer, à la surprise générale”. En fait ce n’est pas surprenant tant que ça à y regarder de plus près. Qu’allait-on avoir si le train présidentiel continuait de foncer, en écrasant tous ceux qui lèvent la tête pour protester ? Au meilleur des cas un Parlement fantoche entièrement acquis à la cause du président de la République, vu le boycott massif de l’opposition ; au pire pas de Parlement du tout vu les conditions draconiennes pour candidater et être élu… 

Saied aurait pu s’accommoder de l’un ou l’autre, même les Tunisiens dans leur grande majorité auraient pu se passer de leurs députés vu les souffrances que leur a infligées le défunt Parlement. Mais voilà le chef de l’Etat n’est pas seul, la Tunisie n’est pas seule, elle est scrutée à la loupe, épiée dans ses moindres faits et gestes et ce qu’on pardonne à l’Egypte pour laquelle tout espoir de sursaut démocratique est enterré on ne le pardonne guère aux Tunisiens. Quelqu’un a peut-être réussi à convaincre Saied qu’en intégrant un tant soi peu ses ennemis – les partis – et leurs appareils, il est possible de remplir l’hémicycle du Bardo et sauver la face démocratique de la Tunisie…

Mais il ne faut pas croire une seconde que c’est l’agitation des opposants, plus faibles et impopulaires que jamais, qui a fait reculer, fléchir ou flancher le camp présidentiel, c’est la pression étrangère, constante, qui a fait son oeuvre, une main étrangère dont d’ailleurs Tunis dépend financièrement. L’Union européenne avait donné un quitus au chef de l’Etat et avait fixé les échéances électorales de décembre prochain pour solder les comptes. Saied ne pouvait pas – il n’en a pas les moyens – aller à ce rendez-vous avec ce lourd passif en matière de libertés prises avec l’ordre constitutionnel, avec les us et coutumes démocratiques. Il vient de faire une première concession, en se cachant derrière l’ISIE, d’autres reculades devraient suivre…

 

 

 

 

 

 

 

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