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Maroc-Israël : L’ami du Roi ose là où il recule, Tahar Ben Jelloun a frappé et fort…

Maroc-Israël : L’ami du Roi ose là où il recule, Tahar Ben Jelloun a frappé et fort…

La question palestinienne est sans doute la plus lancinante pour le Maroc. Les relations privilégiées entre Israël et le royaume sont sans doute celles qui travaillent le plus la conscience marocaine, avec toutes ces horreurs innommables que Tsahal fait subir aux populations civiles de Gaza depuis plus de 4 mois. Entre des citoyens qui éructent, s’indignent, manifestent, boycottent et un palais royal qui se mure dans un silence gêné les foudres de la justice de Sa Majesté frappent les têtes qui dépassent. Le magazine marocain “TelQuel”fait partie des rares qui ont osé. Un autre a osé et pas des moindres : le célèbre écrivain, poète et peintre franco-marocain Tahar Ben Jelloun, un homme qui a ses entrées au palais du roi Mohammed VI. La lettre ouverte qu’il a adressée au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu l’Etat hébreu ne l’oubliera jamais, le monde ne l’oubliera jamais tant elle exhale la force de la vérité absolue. La voici dans son intégralité :

“Monsieur le Premier ministre,

J’ai le devoir, en tant que simple citoyen, de vous annoncer que vous avez perdu la guerre contre le Hamas et les Palestiniens.

Vous ne le savez sans doute pas, non pas parce que vos services de renseignements vous ménagent et vous mentent mais parce qu’on ne peut pas éradiquer un peuple, une population où se trouveraient des combattants responsables de l’horrible tragédie du 7 octobre. À moins de tuer massivement tout le monde, ce que vous essayez de faire, tout en étant indifférent et sourd aux protestations de nombreux pays et de nombreux peuples.

Assassiner, tuer, aller jusqu’à bombarder des maisons de civils où meurent par milliers des familles entières, ce n’est pas faire la guerre, c’est engager une volonté féroce de faire disparaître des Palestiniens. Il ne s’agit plus de les reconnaître mais de faire en sorte de les annihiler au point qu’il n’y ait plus un Palestinien sur terre.

Vous avez perdu la guerre contre le Hamas

Nous avons tous en mémoire la voix de la petite Hind – six ans –, coincée dans une voiture où ses parents venaient de mourir, qui appelle au secours en disant qu’elle ne veut pas mourir et qui finira par être visée par un sniper qui ne ratera pas son tir.

Des Hind, il y en a eu des centaines, des milliers sur les 28 000 morts à Gaza depuis le début des représailles.

Nous avons en mémoire l’image de ce père qui a perdu tous ses enfants ainsi que sa femme, assis au milieu de ces corps criblés de balles, réclamer lui aussi la mort car elle serait pour lui plus douce qu’une vie sans ceux qui faisaient sa vie.

Vous avez perdu la guerre parce qu’on ne gagne jamais en tuant aveuglément, sciemment, volontairement des populations désarmées, affamées, désemparées, désespérées, fuyant comme elles peuvent des bombes qui tombent sans arrêt et les prennent pour cible.

Vous avez perdu la guerre parce que, contrairement à ce qu’on pensait, la cause palestinienne s’est réveillée et a reçu des soutiens du monde entier, aussi bien en Amérique qu’en Angleterre et dans les pays européens.

Des chefs d’État, et pas des moindres, à commencer par vos amis et complices comme l’administration américaine, vous demandent d’arrêter les combats et de ne pas mettre à exécution votre désir de vengeance visant les populations réfugiées à Rafah.

L’Afrique du Sud a engagé devant la plus haute juridiction des Nations unies une procédure accusant l’État d’Israël de génocide à l’encontre des Palestiniens dans la guerre à Gaza.

Plus de 50 pays ont rejoint l’action de Pretoria.

Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a condamné votre action.

Tôt ou tard, vous serez jugé pour ces crimes

Vous avez perdu la guerre parce qu’on ne fait pas la guerre en violant ses règles et ses principes.

Nous savons qu’Israël nous a habitués à ne jamais prendre au sérieux les résolutions des Nations unies le condamnant. Cette fois-ci, il est question de génocide et de crimes de guerre, des crimes contre l’humanité. Tôt ou tard, vous serez jugé pour ces crimes.

Vous avez perdu la guerre parce que les dirigeants du Hamas dans leur majorité sont encore actifs. Sans doute parce que la population les aide et les protège, non pas nécessairement en accord avec leur idéologie ni même avec les atrocités commises par des éléments le 7 octobre, mais elle les protège parce que seul le Hamas semble capable de vous infliger une défaite, peut-être pas militaire mais morale et politique.

Vous avez perdu la guerre parce que vous aurez beau généraliser les massacres, vous n’éliminerez jamais la volonté farouche de la résistance d’un peuple en lutte contre un État que vous avez transformé en massacreur et génocidaire.

*Tahar Ben Jelloun est un écrivain, poète et peintre franco-marocain né le 1ᵉʳ décembre 1947 à Fès. Auteur de nouvelles, romans, poèmes et essais, il est lauréat du prix Goncourt pour son roman « La Nuit sacrée ».

 

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