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Israël-Gaza : Les “frères” arabes ont validé “in petto” la mort du Hamas au nom d’intérêts supérieurs

Israël-Gaza : Les “frères” arabes ont validé “in petto” la mort du Hamas au nom d’intérêts supérieurs

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu n’a pas tenu ses promesses de campagne électorale : Assurer la sécurité d’Israël. Il avait aussi promis qu’avec lui au pouvoir il n’y aura jamais d’accord de Paix avec le voisin palestinien. Là il tient au parole, aidé en cela par le gouvernement le plus extrémiste de l’histoire du pays. Donc quand les Israéliens ont élu ce va-t-en-guerre, en dépit de toutes ses casseroles judiciaires, ils l’ont fait en toute connaissance de cause. Quand il prévient que la guerre contre le Hamas sera “longue et difficile” il faut le croire. Netanyahu n’a d’autre choix que cette fuite en avant sanglante pour se protéger le plus longtemps possible des couteaux que ses adversaires politiques cachent dans le dos pour l’après-guerre…

L’Iran et le Hezbollah font le service minimum pour de bonnes – ou mauvaises – raisons

Quand le Premier ministre dit que ce face-à-face sera long cela veut dire aussi que pour éviter un trop grand nombre de morts dans les rangs de l’armée il va y aller «méthodiquement», pas à pas, ce qui signifie que Tsahal pourrait occuper le nord de Gaza dans la durée et faire de la vie des populations locales un enfer pour les forcer à partir. Ce n’est pas le conseil qu’avait donné le président Joe Biden à Netanyahu, en allusion au flop de l’occupation américaine en Irak. Mais à ce stade la rationalité n’est plus de mise à Tel-Aviv

Le Hamas avait misé sur un embrasement général après son coup d’éclat du 7 octobre ou à tout le moins que ses alliés directs, l’Iran et le Hezbollah libanais, montent au front pour déborder l’armée israélienne. Téhéran éructe, vocifère et brandit des menaces mais de fait il joue petit bras. D’abord parce que concrètement l’Iran a atteint ses objectifs en explosant le rapprochement entre Israël et l’Arabie saoudite. Téhéran a enterré la hache de guerre avec le grand rival saoudien mais pas question de le laisser pactiser avec l’ennemi historique…

La deuxième raison de la mollesse iranienne face à ce que fait Netanyahu à Gaza ce sont les deux porte-avions américains qui rodent dans la région. Il ne faut pas négliger leur capacité de dissuasion. Des mastodontes qui embarquent chacun quelque 70 avions de combat et une pléthore de lance-missiles ça calme forcément. Et puis il y a l’état désastreux de l’économie iranienne, étranglée depuis des années par les sanctions internationales à cause des velléités nucléaires. Téhéran n’a tout simplement pas les moyens d’affronter la puissance de feu des USA et d’Israël.

Le Hezbollah est lesté par les mêmes réalités internes. Les Libanais, exsangues économiquement, ne supporteraient pas les tourments que leur infligerait un combat avec les armées les plus puissantes du monde. Donc le groupe chiite se contentera de faire du service minimum en balançant sporadiquement des roquettes pour faire bonne figure aux yeux de la rue arabe, tout en prenant soin de ne pas provoquer la colère noire de Tsahal.

Pendant que les Saoudiens organisent un méga combat de boxe et décrochent le Mondial 2034

Quid des autres pays arabes, qui claironnent leur soutien aux Palestiniens ? Que font-ils présentement ? Et bien ils rasent les murs en attendant que l’orage passe. L’Egypte maintient sa porte fermée face aux réfugiés palestiniens pour moult raisons : cynisme absolu, crainte d’une profonde déstabilisation à deux mois des élections, crainte que les islamistes se mêlent aux réfugiés et réveillent les vieux démons d’Abdel Fattah al-Sissi, les difficultés économiques du pays, etc.

L’Arabie saoudite ronge son frein depuis que le Hamas a torpillé le processus de normalisation avec Israël, qui était en très bonne voie. Riyad depuis fait comme il peut pour conjurer le mauvais sort, comme par exemple organiser un méga combat de boxe qui le week-end dernier a drainé les célébrités du monde entier, ou saliver à la perspective d’organiser la Coupe du Monde 2034 – puisqu’il n’y a pas de concurrent a dit la FIFA – histoire de montrer au «petit» Qatar qui a accueilli le dernier Mondial que l’Arabie saoudite joue dans la cour des grands.

Le Maroc aussi a laissé beaucoup de plumes dans le chaudron du Proche-Orient, lui qui avait célébré ses noces avec Israël sous la houlette des Accords d’Abraham initiés par l’ex-président américain Donald Trump en 2020. Rabat a gagné gros dans cette affaire : la reconnaissance par les USA et Israël de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Et derrière les échanges commerciaux avec l’Etat hébreu ont suivi. Donc de toute évidence l’attaque du 7 octobre est une très mauvaise nouvelle pour le Maroc, avec cette opinion publique qui se cabre à la vue des horreurs que Tsahal commet à Gaza au nom de son droit à se venger du groupe islamiste palestinien.

Même le Qatar, qui finance le Hamas et offre un exil doré à ses leaders politiques, est pris en tenaille entre sa bonne conscience et la pression américaine pour couper les vivres à ceux que l’Occident qualifie de «terroristes». Ces dernières années tout était bien réglé comme une montre, si on peut dire, avec des Qataris qui chaque mois signaient pour l’enclave palestinienne un chèque de 30 millions de dollars. Israël qui avait l’œil sur tout le fermait et laissait passer pour qu’en échange ses colons grignotent la Cisjordanie, ce qu’ils font depuis 1967. Parallèlement à ça il y avait l’accord tacite pour normaliser avec Bahreïn, les Emirats arabes unis et en bout de course l’Arabie saoudite. La lune de miel s’est arrêtée le 7 octobre.

Ils refusent publiquement de rencontrer Biden, derrière ils lui demandent de les protéger

La dernière fois que les Etats arabes se sont réunis pour parler de Gaza c’était le 21 octobre dernier, en Egypte. Le Caire avait mis toutes les chances de son côté en faisant tout pour que les adversaires les plus coriaces d’Israël, l’Algérie et la Tunisie surtout, ne viennent pas. Al-Sissi, un partenaire de l’Etat hébreu, voulait un accord minimal pour donner des gages à une rue qui fulmine. A l’arrivée l’Irak a refusé de qualifier le Hamas de groupe terroriste et de condamner la frappe du 7 octobre. Donc le président égyptien n’a pas eu sa victoire diplomatique : une Déclaration commune.

De toute façon ce Sommet était une farce en l’absence de la seule partie qui peut tordre le bras – et encore il faut voir – de Netanyahu, Joe Biden. Quelques jours avant le rendez-vous du Caire les leaders arabes avaient refusé de rencontrer le président américain au nom de leur indignation suite au bombardement de l’hôpital de Gaza. La politique de la chaise vide dans cette conjoncture est une faute stratégique au mieux, au pire une faute morale lourde vis-à-vis des Palestiniens. Les dirigeants arabes n’y ont pas gagné en crédibilité et Gaza a raté la seule perche qui lui a été tendue.

Le pire dans cette affaire c’est que celui qui devait accueillir le Sommet avec Biden, le roi de la Jordanie – qui a aussi de très bonnes relations avec Israël -, s’est retourné le 29 octobre dernier pour demander au parrain américain de déployer des systèmes de défense à ses frontières pour le protéger des dégâts collatéraux de l’agitation régionale. On en est là : On affiche une chose en public pour calmer son opinion publique, derrière on court pour pactiser avec les plus forts, Israël et les USA, au nom des intérêts supérieurs…

C’est cela le drame du monde arabe. Ce sont ces gens qui parlent pour les Palestiniens depuis des décennies. Et si le Hamas pouvait disparaître pour que ce manège continue ils ne s’en plaindraient pas. Ils ne le crieront jamais sur les toits mais ils n’en pensent pas moins.

 

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